De 21 à 30

Chronique N°21 du vendredi 7 septembre 2017. l’art et les riches

L’origine des maux du monde (suite)

L’art selon PéPé

Qu’est-ce que l’art ? C’est ce que font les artistes ! Qu’est-ce qu’un artiste ? C’est celui qui fait de l’art !

L’art a commencé dès que l’homme s’est sédentarisé lorsque la société s’est divisée en chefs et en serviteurs appelés peuple. De même que de nos jours des gens du peuple que rien ne distingue a priori se révèlent doués en musique, en littérature, en peinture ou en sculpture on peut imaginer que dans une époque reculée un individu lambda doué ait dessiné spontanément sur le sable, une pierre ou sur un morceau de bois, pour s’amuser en se laissant guider par son inspiration, des motifs géométriques, des visages ou des portraits d’animaux même sommaires qui lui passaient par la tête. Cet individu était un artiste et le produit de son activité était de l’art.

Un chef passant par là, séduit par la production de l’artiste, a pu, parce qu’il était le chef, s’accaparer de son talent pour décorer sa demeure ou ses armes. Ou bien un sorcier ou un prêtre sous l’emprise d’une drogue ou en état de transe a pu voir dans les dessins une manifestation divine et les introduire dans ses célébrations en les consacrant c’est à dire en décrétant qu’ils étaient sacrés. Puis la foule a souscrit à ce que prescrivait l’autorité religieuse. On peut imaginer aussi que les tâches de décoration et de confection d’objets sacrés n’étaient pas confié à n’importe qui choisi au hasard mais à celui qui réussirait le mieux, à celui que l’on considérerait comme un artiste sans le dire, puisque la notion n’existait pas.

L’art selon PéPé c’est ça : une création gratuite de l’esprit d’un homme ou d’une femme, appelés artistes de nos jours, qu’il matérialise sans autre finalité que le plaisir de créer. Elle peut être considérée, admirée et récupérée par l’entourage du créateur à toutes sortes de fins pour toutes sortes de raisons.

Il résulte de cette définition que l’art occupe un domaine extrêmement large qui ne se limite pas au champ esthétique même si pour la plupart des gens l’art se borne à la création du beau ou de l’agréable. Une autre conséquence est qu’il existe une foule d’artistes ignorés. Quelques-uns passent à la célébrité momentanément ou durablement lorsqu’il sont pourvus de ce qu’il est convenu d’appeler du talent ou du génie. Des autres on dit qu’ils sont des artistes médiocres. Mais ce jugement n’est bien souvent qu’une question d’appréciation, d’époque ou de circonstances.

Donc, d’un point de vue purement matérialiste l’art est inutile dans la mesure où il ne produit rien de ce qui est nécessaire à la survie des hommes. C’est ce que disent les extrémistes et les ascètes religieux de toutes confessions car ils prennent l’art dans son acception la plus étroite : des créations qui rendent la vie agréable en favorisant un sentiment de bien-être. Ce qui va à l’encontre de leur conception de la vie : « les gens sont sur la terre pour en chier sous la surveillance d’un dieu vindicatif afin d’aller au paradis après la mort pour se farcir plein de vierges ».

D’aucuns considèrent que les artistes font partie des choses utiles et nécessaires pour faciliter notre passage sur terre en donnant du plaisir. C’est vrai que certaines formes d’art se sont démocratisées grâce aux moyens de communication modernes : une certaine musique, un certain cinéma, une certaine littérature, et la reproduction d’œuvres. Aux nantis les formes d’art élitistes et la possession d’œuvres originales.

L’artiste et l’artisan

Jusqu’à une époque récente on confondait l’artiste et l’artisan. Aujourd’hui on établit une différence. Ce qui les rapproche : tous deux créent. Ce qui les distingue : l’un fabrique de ses mains, matériellement, sans imagination de façon répétitive des objets utiles, c’est à dire qu’ils vont être utilisés pour réaliser des tâche matérielles pratiques, l’autre crée ce qu’il est convenu d’appeler des oeuvres, sans utilité pratique, qui sont le fruit de son imagination pour le plaisir de faire et éventuellement pour agir sur la psychisme des gens afin de faire naître des sentiments positifs comme la joie ou l’admiration ou négatifs comme la crainte ou l’horreur.

L’artisan fabrique des chaises pour s’assoire, usage pratique dans la société occidentale. L’artiste va décorer ces chaises pour les rendre attrayantes. Que les chaises soient décorées ou non, elles rendront les mêmes services pratiques. L’artiste a travaillé sans autre but que de se faire plaisir et faire naître un sentiment la plupart du temps esthétique chez celui qui contemple la chaise.

Lorsque c’est l’artisan qui décore ses chaises et que cette décoration est le fruit de son imagination alors il est aussi artiste et comme pour l’artiste pur la qualité de ses oeuvres est jugée en fonction de son talent ou de son génie. S’il ne fait qu’imiter ce qui existe déjà alors il reste un artisan. Lorsqu’il invente des formes de chaises en utilisant des matériaux inhabituels ou nouveaux, il se transforme aussi en artiste car là encore il se fait plaisir et crée des sentiments d’étonnement, d’admiration, de dérision ou d’esthétique chez l’observateur sans que la nouvelle chaise, quelle que soit son originalité n’ait d’autre utilité que de s’assoire, même si la nouveauté de sa conception la rend parfaitement inconfortable.

On peut reprendre le raisonnement pour tout objet usuel que l’artiste transforme en objet d’art : un vase, un voiture, une selle, la façade d’une maison, etc. ….

L’art pour qui ?

Par principe la production de l’artiste sort de l’ordinaire et ce qui sort de l’ordinaire attire l’attention et la convoitise de certains. C’est historiquement évident surtout pour les arts graphiques, la sculpture, l’architecture, la littérature et la poésie. En musique le musicien qui ne fait que jouer ce qui est écrit sur la partition et que d’autres ont joué avant lui n’innove pas. On dit qu’il interprète l’œuvre musicale. Cependant le mélomane qui est capable d’apprécier que son interprétation est à nulle autre pareille le considère comme un artiste et il cherchera, s’il en a les moyens à l’accaparer comme le faisaient les nobles dans l’ancien régime.

On peut dire la même chose du comédien ou de la comédienne qui répète indéfiniment soir après soir une pièce à succès.

Quand on est riche et puissant, qu’on n’est pas quotidiennement confronté à la servitude, à la rudesse, à la saleté et à la dureté du travail quotidien et de la matière comme l’étaient les paysans, les ouvriers et les mineurs d’autrefois, qu’on n’a pas de souci du lendemain comme le sont les pauvres, alors on se donne le droit et même le devoir d’être délicat et raffiné.

Cette délicatesse et ce raffinement est un attrait du pouvoir et de la richesse. Il se manifeste dans toutes les situations de la vie courante. Pour s’en convaincre, il suffit de jouer les touristes et d’aller visiter les riches demeures et les palais à travers le monde. On s’aperçoit qu’ils sont pourvus de toutes les commodités pratiques présentes au moment de leur construction pour bien manger, bien se déplacer, bien dormir, bien se chauffer ou bien se rafraîchir suivant le climat mais surtout qu’ils croulent sous les oeuvres d’art de toutes sortes qui ne servent à rien d’autre qu’au plaisir des sens des propriétaires.

Tous les arts permis par les religions sont représentés dans ces demeures : l’architecture, les arts graphiques, la sculpture, la musique et le théâtre, appliqués aux objets les plus triviaux comme la vaisselle ou les pendules. Le tout doré sur toutes les coutures pour contempler l’image de sa fortune et de son pouvoir en permanence car l’or est le symbole de la richesse et accessoirement de la puissance. Car c’est un autre rôle de l’art : satisfaire l’ego du possesseur.

Les lieux de culte aussi ont accaparé et accaparent encore de l’art, mais c’est une autre histoire. On peut dire cependant qu’ils mettent l’art à la portée du peuple pour le captiver et l’embobiner.

Pour en revenir aux touristes qui admirent béatement ce qui brille, ils ne se rendent pas compte que ces merveilles ont poussé et fructifié sur un fumier qui les concerne tous : le travail humain ou pour dire les choses autrement elles sont le résultat de l’exploitation des masses par quelques-uns.

Le menu peuple aussi est consommateur d’art, mais d’art modeste le seul à sa portée : de calendriers des postes, d’images d’Epinal, de danse folklorique, de chansons à boire, de valses musette, de carreaux de faïence, de séries télévisées, etc. … Même l’art des musées lui est inaccessible car il ne pense pas ou n’ose pas y entrer !

Et les artistes dans tout ça ? Autrefois, qu’ils aient été considérés comme artistes ou artisans, ils ont toujours eu un statut particulier. Ils vivaient de leur travail. Ils étaient protégés par leurs employeurs et dispensés des corvées qui incombaient aux manants. Ils pouvaient même être respectés. Malgré tout, c’étaient des parasites de la société car pour les nourrir, il fallait bien voler de la nourriture à ceux qui la produisaient. Tout cela pourquoi ? Pour fabriquer et produire des oeuvres inutiles qui donnaient du plaisir à quelques-uns.

Rien n’a changé aujourd’hui, mais les choses se présentent autrement. L’art s’est démocratisé, c’est à dire qu’en occident une part assez importante de la population a accès directement à l’art.

Faut-il s’étonner que dans des mouvements populaires violents comme les révolutions, les plus vindicatifs s’en prennent justement à ce qu’on appelle des oeuvres d’art qui sont pour eux le symbole de leur exploitation dans le seul but de conquérir l’inutile qui leur est inaccessible. Le bourgeois s’indigne alors de ce qu’il appelle du vandalisme.

On peut regretter ces mouvements de colère qui détruisent de belles choses (?) coûteuses. On peut aussi comprendre que des gens misérables poussés à bout s’en prennent à ce qu’ils peuvent pour exercer leur vengeance.

D’une façon générale, les riches et les puissants cherchent à jouir du plaisir de posséder des oeuvres d’art. Mais les motivations peuvent être très différentes d’une personne à l’autre. Pour la personne délicate et raffinée c’est par passion intellectuelle. Pour celui qui aime accumuler c’est pour combler son esprit collectionneur. Pour la brute et le truand c’est pour satisfaire leur ego et leur goût de la spéculation.

La valeur des oeuvres d’art

Il y a là un mystère qui défie tout bon sens et toute logique que je voudrais que l’on m’explique ! Pourquoi tel peintre qui n’a rien vendu de son vivant voit du haut du ciel le prix de ses oeuvres s’envoler dans les ventes publiques à des hauteurs stratosphériques ? Pourquoi tel peintre qui ne produit que des gribouillis vend ses oeuvres plus chères que tel autre qui produit des oeuvres admirables de sensibilité et de beauté ? Pourquoi des objets dont aucune personne sensée ne voudrait dans son appartement sont vendus à des prix prohibitifs parce qu’ils sont vieux ? Pourquoi certains artistes sont fétichisés et sacralisés par les médias et d’autres vilipendés et ostracisés sans que les personnes sensées en comprennent les raisons ?

J’ai bien une petite idée sur la question. C’est parce qu’il y a des malines et des malins appelés marchands d’art, qui ont un sens inné de la psychologie du nanti et qui savent se servir des moyens modernes de communication pour faire prendre des « vessies pour des lanternes » à des gogos richissimes. A ces gens tellement occupés à augmenter leur fortune qu’ils délèguent à d’autres le soin de réfléchir à ce qu’ils doivent acheter pour paraître cultivés et dans le vent ou pour spéculer.

Ces malins et ces malines appartiennent à une espèce de parasites des capitalistes, celle qui s’attaque aux gens dorés sur tranche qui veulent bien se laisser berner. Dans un monde pourri par l’argent, peut-on leur reprocher d’être ce qu’ils sont, des opportunistes qui espèrent toucher le gros lot ?

Chronique N°22 du vendredi 22 septembre 2017. Les capitalistes et le socialisme

L’origine des maux du monde (suite)

Accommodements avec la morale

Comme je l’ai déjà écrit, depuis des temps immémoriaux, en fait depuis que des tribus à travers le vaste monde ont cessé de vivre de chasse, de pêche et de cueillette pour se sédentariser, des gens forts et malins, intelligents et malins, forts et intelligents ou forts intelligents et malins ont séparé leur société en deux castes : celle des exploités et celle des exploiteurs. Dans l’Egypte ancienne un pharaon pouvait se faire construire une pyramide faite de millions de tonnes de pierre ; on ne me convaincra pas que les paysans et les ouvriers travaillaient alors dans la joie et la bonne humeur pour construire une telle horreur qui volait leur énergie. En Grèce et à Rome des philosophes pouvaient bavarder sur la taille de leur nombril parce que des esclaves et le petit peuple les nourrissaient. De quoi vivaient les empereurs chinois et les maharadjahs des Indes couverts de pierres précieuses ? Et sous l’ancien régime en Europe d’où provenaient les ressources pour construire palais et châteaux et nourrir des cours nombreuses stériles et serviles ?

Ce partage en deux classes des sociétés se retrouve aujourd’hui de façon plus ou moins tranchée et visible sur tous les continents.

Les exploités innombrables n’ont que leur force de travail comme fortune. Les exploiteurs peu nombreux sont propriétaires de toutes sortes de biens meubles et immeubles qu’ils acquièrent grâce au travail des exploités en les volant et qu’ils accumulent avec le temps car ils n’en ont jamais assez.

Jusqu’à récemment, en occident les uns vivaient dans ce qu’il est convenu d’appeler le luxe pendant que les autres survivaient dans la misère et la crasse. Les uns avaient droit de vie et de mort sur les autres. Aujourd’hui, grâce à la pensée de certains philosophes le système s’est adouci. Mais certains trouveraient tout à fait normal qu’on revienne à l’ancien régime !

Cependant, est-ce bien ou est-ce mal que quelques-uns se prélassent dans le luxe pendant qu’une majorité trime plus ou moins malgré elle pour fournir la nourriture et la richesse des premiers. Il y a pire : ceux qui plongent volontairement des gens dans le chômage et la misère pour augmenter leur fortune.

En d’autres termes, est-ce moral ? Les exploiteurs ont des réponses toutes faites pour contourner la réponse à la question morale. Par exemple les cyniques diront : « la morale, pour quoi faire ? »

D’autres, pas meilleurs, diront :

  • c’est Dieu qui gère cette situation, qu’y pouvons-nous ? Après cette explication, il n’y a plus qu’à tirer l’échelle !
  • si les pauvres sont pauvres, c’est qu’ils le veulent bien, ils n’ont pas d’ambition ils n’ont qu’à faire comme nous, travailler pour devenir riches ;
  • heureusement pour les pauvres que nous sommes là, car sans nous qui leur donnerait du travail et par conséquent à manger ?

Avec des mots et suffisamment d’imagination, on peut trouver une foule d’autres justifications de cette dichotomie de la société. Les mots sont faits pour ça ! Toutes ces bonnes et mauvaises raisons font partie de la propagande diffusée à longueur de temps par les médias aux ordres, si bien qu’elles finissent par être intégrées par les gens qui y trouvent leur compte et par ceux qui se trouvent devant le fait accompli sans pouvoir en sortir. Peut-on les accuser de ne pas réfléchir et de ne pas s’opposer à cet état de cause. Qu’y peuvent-ils ?

Il y a aussi les hyper nantis qui vivent entre eux depuis des générations et qui ignorent ou s’obstinent à ignorer de quoi est fait le monde.

A vot’bon cœur m’sieurs dames

Il est probable que de tout temps des gens plus ou moins nantis ont été émus par l’inhumanité et l’injustice de cette situation. Ils ont été de deux types : ceux qui ont voulu changer radicalement les fondements de la société, c’est à dire ceux qui ont souhaité que le bien commun soit partagé équitablement entre tous et ceux qui ont prôné une redistribution plus ou moins partielle des biens spoliés laissée à la bonne volonté des exploiteurs.

Comme exemple du premier type en occident il y a le célèbre Jésus Christ. C’était un empêcheur de s’enrichir en rond. Comme tous les empêcheurs de tourner en rond de l’histoire, il a mal fini, broyé par ceux qu’il dénonçait.

Un mot caractérise le deuxième type, c’est le mot charité. C’est une histoire de religion que l’on trouve chez les chrétiens, les musulmans, les indous et certainement dans d’autres religions. Le principe est un simple marchandage : « si tu veux aller au paradis après ta mort, tu as le droit de vivre sur le dos des exploités à condition d’être charitable, c’est à dire de redistribuer aux malheureux que tu as contribué à mettre dans la merde des miettes de tes rapines ». Ça marche à condition que les richissimes croient en une vie après la mort, mais pour les autres, les plus nombreux aujourd’hui ?

Ils créent des fondations charitables avec force tapage médiatique autour pour satisfaire leur ego et pour montrer à quel point ils sont beaux, grands et généreux. Le plus rigolo de l’histoire c’est qu’ils ne subventionnent même pas eux-même leurs fondations mais qu’ils font appel à la charité publique ou privée pour recueillir des fonds ! Chassez le naturel il revient au galop : on est grippe sous ou on ne l’est pas !

Socialisme

De tout temps et en tout lieu des gens exploités désespérés entraînés par des écervelés intelligents et dynamiques ont tenté de se soulever contre leurs exploiteurs. Ça a toujours fini de la même façon : des bains de sang, car la raison du plus fort est toujours la meilleure !

On dit que l’injustice est le pire des maux que peut subir un être humain et en particulier le travailleur pauvre. Or il est conscient de façon constante de cette injustice quand il compare sa condition d’exploité à celle de l’exploiteur. Il sait qu’elle est due à l’exploiteur. Il est donc soumis à une double peine : il vit dans la misère et il a ce sentiment d’injustice qui le ronge.

D’où l’idée assez récente en occident de quelques nantis dits humanistes* qu’une société harmonieuse serait celle où régnerait la justice, c’est à dire que la richesse du monde ne serait pas accaparée par quelques-uns à leur seul profit mais répartie sinon uniformément du moins équitablement afin que tout le monde profite de cette richesse. On trouve cette idée dans la déclaration des droits de l’homme : « les hommes naissent libres et égaux en droit » et dans la constitution des Etats Unis où il est question du « droit au bonheur » des individus. Elle a été développée par des philosophes. Mais ces bonnes résolutions généreuses énoncées par des humanistes restent théoriques car les capitalistes trouvent de bonnes raisons pour s’assoire dessus et traiter des gens plus mal que leurs animaux domestiques.

LA question est : pourquoi ? La réponse est toujours la même : parce que c’est comme ça. Parce que il y a des hommes qui sont des loups pour les autres. Parce que c’est dans leur nature, que ce soit acquis ou inné (cf les capitalistes et les sentiments). Les exemples en fourmillent dans l’histoire. Et de plus ces animaux sauvages ne comprennent pas qu’une large part de l’humanité se contente naturellement de peu sans autre ambition que d’être plutôt qu’avoir. Ils les méprisent et les traitent de feignants comme l’a fait Macron dans l’un de ses discours. Ils n’ont alors aucun scrupule à les exploiter.

Or donc il y a eu des humanistes qui ont théorisé cet état de fait et le moyen d’y remédier et d’autres qui ont essayé de mettre en pratique leurs idées soit de façon brutale dans des révolutions soit en menant des réformes politiques. Pour simplifier je dirai que les premiers ont été nommés communistes, les seconds socialistes.

Les capitalistes des USA qui craignent pour leur fortune les confondent dans le seul terme de communiste en martelant dans leur propagande que la justice sociale, le bonheur sur terre pour tout le monde est une utopie, un but impossible à atteindre, et que par conséquent ce n’est même pas la peine d’essayer, et que ceux qui veulent essayer quand même sont des fous asociaux qui doivent être purement et simplement éliminés. C’est ce qu’ils ont fait partout où ils le pouvaient dans le monde. Ils continuent.

En effet, c’est une utopie de croire que les riches, super riches et hyper riches qui appartiennent à une catégorie particulière de malades mentaux, les éternels inassouvis, voudront un jour partager et donc abandonner spontanément leur fortune. Cette utopie subsistera tant qu’un savant fou n’aura pas inventé une drogue ou une hormone qui, pulvérisée dans l’atmosphère de la terre entière, rendra l’ensemble de l’humanité saine, bonne et généreuse comme pourrait le faire un dieu juste et bon. C’est évidemment l’utopie des utopies !

En France, comme dans d’autres pays européens, le socialisme a inspiré des politiques à certaines périodes. Ses effets se sont fait sentir particulièrement pendant le front populaire en 1936 et tout de suite après la seconde guerre avec le conseil national de la résistance où des acquis sociaux importants ont vu le jour. L’état a joué alors un rôle de régulateur de l’économie et de redistributeur des richesses ce qui a permis aux salariés les plus modestes de voir leur niveau de vie augmenter au grand dam des capitalistes français qui ont cependant laissé faire parce qu’ils ne pouvaient pas faire autrement tant qu’ils acceptaient la démocratie.

Dans d’autres régions du monde des révolutions ont mis en place le communisme, c’est à dire la mise en commun des moyens de production et la distribution aussi équitable que possible des richesses créées (à chacun ses besoins). Ce système appelé aussi dans certains pays la dictature du prolétariat n’a pu se construire qu’en éliminant physiquement les nantis et les possédants et se maintenir qu’en instituant une sorte de terreur permanente pour éviter que des individus opportunistes prennent la place des riches disparus.

Les capitalistes ont eu beau jeu de dénoncer cet état de fait et les inconvénients du système sans jamais en avouer les avantages pour le menu peuple. Ils ont donc axé leur propagande sur ce qui a leurs yeux est le salut : la libre entreprise, c’est à dire la possibilité pour certains de s’enrichir sans contrôle en construisant l’égalité : « monde non communiste = monde de la libre entreprise = monde de la liberté = monde libre ». Pendant cinquante ans j’ai entendu et lu ces deux petits mots à la gloire des super et hyper nantis.

En même temps ils ont craint que le communisme ne fasse tache d’huile dans le monde et aille à l’encontre de leurs intérêts purement financiers. Ils l’ont combattu partout où il pointait le bout de son nez, soit directement comme en Indochine, soit en organisant des insurrections, des coups d’état ou des assassinas pour installer des dictatures à leur botte en Afrique et en Amérique du sud sans se préoccuper des souffrances qu’ils allaient imposer aux populations des pays concernés.

Ils ont fini par triompher. L’URSS est morte. La Chine s’est ralliée à l’économie de marché. Restent Cuba et la Corée du nord, quantités négligeables, qui s’en réclament. C’est à partir de ce moment que les peuples du « monde libre » ont recommencé à souffrir car jusque-là l’existence de mondes communistes puissants faisait contrepoids à la volonté de puissance du capitalisme.

Les riches Américains et d’autres ont pu imposer la liberté du commerce mondial (OMC) pour mettre en concurrence des objets fabriqués à vile prix par des quasi-esclaves dans les pays sous-développés (je sais, il faut dire dans les pays en voie de développement) avec les mêmes objets fabriqués en occident. Et là, victoire, grâce à cette manœuvre qui entraîne une généralisation du chômage en occident, les acquis sociaux obtenus par un siècle de lutte dans des pays à gouvernements plus ou moins socialistes fondent à vue d’œil et bientôt la condition du salarié, quand il aura du travail, sera celle du prolétaire du dix-neuvième siècle. Il sera un travailleur pauvre ou très pauvre sans droit.

Le vœu des Français de droite sera enfin exaucé ! Qu’ils ne se réjouissent pas trop vite, ils seront les derniers à en souffrir, mais ils en souffriront un jour ou l’autre !

Questions : quand la moitié des habitants de la terre sera au chômage, les capitalistes devenus tout-puissants laisseront-ils cette moitié mourir de faim par économie ou la nourriront-ils par calcul, par charité ou par pitié ? S’ils instaurent un revenu universel auquel la raison permet de penser, que permettra-t-il ? Est-ce qu’il continuera à les enrichir ?

Chronique N°23 du vendredi 6 octobre 2017. Les capitalistes et la justice

L’origine des maux du monde (suite)

Le juste et l’injuste

Il y a bien longtemps, quand j’étais petit et qu’à l’école la maîtresse punissait un élève j’entendais souvent cette réflexion dite avec colère ou chagrin : « c’est pas juste ». Elle pouvait être justifiée ou non suivant que son émetteur était sincère ou non. Je ne sais pas si des scènes équivalentes se produisent aujourd’hui encore dans les classes : le société a tellement changé depuis mon enfance ! A cette époque le monde enfantin était très sensible à ce qui était juste ou injuste. Certainement qu’il en est de même aujourd’hui mais que les sentiments ne se traduisent plus de la même façon.

  • Est-il juste que des enfants naissent pauvres, infirmes, laids et débiles ?
  • Est-il juste que des enfants naissent riches, pleins de santé, intelligents et beaux ?
  • Est-il juste que des enfants naissent esclaves ?
  • Est-il juste que des enfants naissent libres ?
  • Est-il juste que des enfants naissent en Suède ?
  • Est-il juste que des enfants naissent dans le Sahel ?
  • Est-il juste que des enfants naissent au bord de la mer ?
  • Est-il juste que des enfants naissent au milieu des continents ?
  • Est-il juste que des gens triment toute leur vie pour survivre ?
  • Est-il juste que des gens passent toute leur vie à vivre dans le luxe et la richesse ?
  • Est-il juste que des peuples vivent dans une guerre permanente ?
  • Est-il juste que des peuples vivent dans une paix permanente ?
  • Est-il juste que des salariés soient payés des fortunes pour mettre des salariés au chômage ?
  • Est-il juste que les femmes soient bien payées que les hommes pour un même travail ?
  • Est-il juste qu’en France des salariés ne touchent pas le même salaire pour le même travail ?

Un observateur dépourvu de tout sentiment venant d’une autre planète découvrant l’humanité dira que ces questions n’ont pas de sens. Il pourra faire un commentaire du genre : « il y a des gens qui n’ont pas de chance ». Il en est de même pour l’humain fataliste ou cynique qui considère que la condition humaine quelle qu’elle soit est dans la nature des choses et qu’il faut s’en satisfaire. Il dira : « la justice n’est pas de ce monde ». L’individu sensible qui réfléchit répondra non à toutes les questions parce qu’instinctivement il les rapprochera par paires, ce qui fera naître chez lui un sentiment d’injustice. Il pensera : ce n’est pas juste que des gens subissent ceci ou cela pendant que d’autres gens se réjouissent, et réciproquement

On voit là que le juste et l’injuste ne sont pas définis par nature. Ils sont relatifs. C’est l’observateur qui décide en fonction de sa position sociale, de sa sensibilité, de ses sentiments et de son expérience ce qui est juste et injuste dans une société. L’empereur chinois qui faisait couper la tête du pauvre paysan qui ne s’était pas incliné sur son passage parce qu’il était sourd (il n’avait pas entendu arriver le cortège impérial) trouvait sa décision parfaitement juste. Qu’en pensait la femme de ce paysan ?

Le juste et l’injuste sont donc définis par une échelle de valeur qui dépend de l’organisation de la société dans laquelle on se trouve. Hors de ce qu’il est convenu d’appeler une démocratie le juste et l’injuste sont dictés par un homme, pharaon, empereur, roi, dictateur et ses conseillers quand il en a. En général sa base de réflexion est la raison du plus fort, c’est à dire que la question du juste et de l’injuste ne se pose même pas.

Le juste et l’injuste en démocratie

Dans les démocraties le juste et l’injuste sont définis par un gouvernement. II est constitué en France par ce que l’on appelle des hommes politiques élus au suffrage universel dont le rôle est de gouverner, c’est à dire d’établir et de faire respecter des lois en fonction de l’idée qu’ils se font de ce que sont le juste et l’injuste. On a vu que les gens n’ont pas tous le même point de vue sur ces deux notions. Il en est de même des hommes politiques qui se regroupent normalement en deux grandes catégories qui se font la guerre (ou qui font semblant quand ils ne sont pas sincères) :

– ceux qui pensent qu’il est juste que les riches aient toujours plus. Ils constituent la droite.

– ceux qui pensent qu’il serait juste que la richesse de notre pays soit répartie plus équitablement entre ses habitants. Ils constituent la gauche (?).

Chacune de ces deux catégories se subdivise à l’infini en groupements plus ou moins importants appelés partis. Ils se chicanent sur des points de détail. C’est ce qu’on appelle la vie politique française.

Avec le temps, sous les coups de boutoir de la propagande des partisans du libéralisme économique une partie importante de la gauche a cessé de tenir son rôle. Elle est devenue inconsistante si bien qu’elle n’a pas pu s’opposer aux dernières élections à l’arrivée au pouvoir d’un mouvement de droite déguisé, élu par une petite fraction de la population.

On continuera donc à trouver juste que les riches empoisonnent matériellement les salariés en les faisant travailler pour pas cher dans des espaces malsains comme ce fut le cas avec les charbonnages ou l’amiante, en les faisant manger des produits qui contiennent des poisons, en les faisant voyager dans des métros ou des trains bondés qui tombent en panne, dans des atmosphères irrespirables, ou en les incitant à s’alcooliser. On continuera à trouver injuste que les salariés s’en plaignent et veuillent empoisonner symboliquement les riches par leurs revendications, leurs rêves et leurs grèves. On (les représentants des riches au gouvernement) leur enverra les « forces de l’ordre » pour leur apprendre à vivre.

Le pouvoir législatif

Les hommes politiques à la tête de l’Etat définissent ce qui est juste et injuste à leurs yeux et traduisent leurs sentiments sous la forme de lois. Par exemple :

  • Il est juste que les voleurs, les escrocs, les assassins, les casseurs soient punis.
  • Napoléon Premier a décrété qu’il était juste que les femmes n’aient aucun droit et soient considérées comme des mineurs incapables. Cette loi a été abrogée par étapes seulement depuis la seconde guerre mondiale.
  • Des législateurs ont trouvé juste qu’une femme qui avait un enfant hors mariage ne pouvait être mère. Résultat ma mère n’a pas eu d’enfant et moi je n’ai pas eu de mère (sur le papier). Et si mon père ne m’avait pas reconnu, je serais né sans parent.
  • Il est juste que des employeurs riches soient violents à l’égard de leurs employés pour devenir plus riches en les virant de leur entreprise et en les plongeant dans la pauvreté quand ça leur chante, et il est injuste que sous le coup de la colère les employés se vengent d’une façon ou d’une autre.
  • Etc. … Peut-on faire confiance à ceux qui font de telles lois et à ceux qui les appliquent ?

Les lois sont rassemblées en cinq codes :

  • le code pénal qui dit comment doit être puni quelqu’un qui n’est pas gentil,
  • le code civil qui règle les rapports entre personnes physiques ou personnes morales,
  • le code du commerce,
  • le code administratif,
  • le code du travail.
La justice

On peut penser le mot « justice » de deux façons :

– la façon philosophique de définir le juste et l’injuste comme ci-dessus,

– l’institution judiciaire qui fait partie de l’Etat sous la forme d’un ministère. C’est celle qui m’intéresse maintenant.

Rendre la justice, c’est dire si les actions des gens ou des sociétés qui sont jugés sont conformes à la loi et éventuellement leur donner une punition s’ils sont en contravention avec elle. C’est départager conformément à la loi deux personnes physiques ou morales qui se disputent. C’est aussi dire quelle est la loi à ceux qui le demandent.

La justice est rendue par des juges qui siègent dans des tribunaux correspondant à la nature du code qui y sera consulté ou appliqué.

La justice est-elle juste ?

Depuis qu’une organisation appelée justice existe des gens s’en plaignent. La Fontaine a écrit : « suivant que vous serez puissant ou misérable la justice vous rendra blanc ou noir ». Victor Hugo a dénoncé l’injustice qui consistait à envoyer au bagne un pauvre type qui avait volé un bout de pain parce qu’il avait faim et à excuser un salopard qui s’était enrichi illégalement.

Que serait une vraie justice ? A mes yeux, ce serait une justice qui, pour une même cause réalisée dans les mêmes conditions rendrait toujours le même jugement. Or il n’en est rien. Un jugement rendu à Marseille, à Paris ou à Lille sur une même cause ne sera pas le même. Non pas à cause du climat mais parce que les juges sont des hommes et que les hommes sont faillibles et soumis à leurs sentiments.

Le juge que l’on voudrait impartial ne peut pas empêcher l’échelle de valeurs qu’il s’est construite de perturber de façon plus ou moins consciente sa façon d’appréhender la cause qu’il doit juger.

Par exemple, s’il est lui-même un chauffard ou un violeur il sera plus indulgent pour le chauffard ou le violeur qu’il doit juger, à moins qu’il ne soit taré et qu’il soit extrêmement sévère pour se dédouane à ses propres yeux. Inversement si une personne qu’il aimait a été victime d’un chauffard ou d’un violeur on peut imaginer qu’il cherchera inconsciemment à se venger.

S’il est issu d’un milieu qui méprise les prolétaires et s’il est lui-même de droite on a le droit d’imaginer que consciemment ou non il favorisera la partie qui lui ressemble dans un conflit patron salarié. Et inversement.

Il ne jugera pas de la même façon, c’est à dire qu’il sera plus ou moins indulgent :

  • s’il est reposé en forme ou après une nuit blanche,
  • à cause d’une rage de dents,
  • juste avant les vacances ou juste après,
  • s’il s’est disputé avec sa maîtresse ou s’il en a trouvé une nouvelle toute jeune vachement bien roulée qui le fait monter au septième ciel,
  • etc. …

Les idéalistes, les hypocrites ou les naïfs disent : « le juge est là pour appliquer la loi et donc son équation personnelle n’intervient pas ». Dans la justice pénale le code est assez clair mais les sanctions sont prévues sous la forme d’une fourchette. Il décide donc d’appliquer ou d’orienter un jury vers la plus légère ou la plus lourde sanction de façon arbitraire tout en trouvant des explications appelées les attendus. Pour les autres formes de justice, depuis l’ancien régime, les lois s’entassent les unes sur les autres sans que les nouvelles aient toujours abrogées les anciennes ce qui rend le choix de la bonne loi pour juger plus ou moins ardu. Le juge peut donc se tromper.

La meilleurs preuve c’est qu’au cours du temps les législateurs ont prévu qu’un juge pouvait être faillible puisqu’il ont créé les cours d’appel pour réparer des injustices éventuelles. Ils ont aussi prévu qu’un juge ne suive pas la loi volontairement ou non dans ce qui est appelé la procédure. Ils ont donc créé les cours de cassation qui cassent des jugements mal rendus, c’est à dire qui les annulent. Les causes doivent alors être rejugées par d’autres tribunaux.

Un dernier facteur intervient dans l’attitude du juge face au justiciable. Malgré tous les efforts déployés par le législateurs pour rendre le pouvoir judiciaire vraiment indépendant du politique, leur avancement dépend peu ou prou du l’État, alors … On ne peut pas leur reprocher d’être parfois tentés de rendre par faiblesse certains jugements ‘dans le bon sens’, ce qui les poussera à commettre sciemment quelques injustices dans l’espoir d’une récompense.

Heureusement il existe des juges intègres qui, malheureusement pour eux, végètent souvent au bas de l’échelle.

Les capitalistes les avocats et la justice

Un proverbe populaire dit : « mieux vaut un mauvais arrangement qu’un bon procès ». Pourquoi ? Parce qu’entre le juge et le justiciable s’interpose une variété particulière de parasite : l’avocat. Il est dans beaucoup de cas imposé par la loi et la tradition. Son rôle est de prendre le parti de son client et de défendre becs et ongles sa cause même si elle est ‘pourrie’, c’est à dire parfaitement malhonnête, immorale et en contradiction avec la loi, autant dire apparemment indéfendable.

Le meilleur avocat est celui qui arrive à tirer d’affaire son client dans tous les cas malgré la difficulté apparente de la tâche, c’et à dire le faire acquitter si c’est un procès au pénal ou lui faire gagner son procès si c’est au civile quel que soit le type de tribunal. Ce type d’avocat est une perle, que dis-je un diamant et comme tous les joyaux il coûte cher, et même très cher !

Un autre problème avec les avocats c’est qu’ils facturent leur travail au forfait ou au temps passé. Dans le second cas ils comptent tant d’euros de l’heure pour s’occuper d’un dossier, temps passé invérifiable la plupart du temps. Ils ont donc intérêt à faire traîner une affaire en longueur quand ils le peuvent pour facturer beaucoup d’heures.

On comprend alors que la justice rendue au pénal à un type fauché auquel on alloue un avocat commis d’office incapable ou qui s’en fout parce qu’il est payé des mégots ne sera pas la même que celle rendue à un hyper riche capable de s’entourer d’une bardée d’avocats super compétents et assez malins pour faire prendre des vessies pour des lanternes à un jury d’assises.

On se retrouve avec le même problème au civile quand un groupe de pauvres gens, s’attaque à une multinationale parce qu’elle les a empoisonnés, soit en tant que salariés soit en tant que consommateurs, et qu’ils sont à l’article de la mort avec toutes les preuves possibles de la responsabilité de l’entreprise. Si les plaignants n’ont pas d’avocats à la hauteur pour défendre leur cause, ils se font bouffer tout crus par ceux des actionnaires. Ces derniers ne regardent pas à payer leur défense car s’ils perdent, une foule de malheureux s’engouffrera dans la brèche ouverte par les premiers, et cela amputera d’une façon significative les dividendes perçus de façon indue.

Il peut arriver qu’un juge éprouve une certaine empathie ou sympathie pour les victimes et s’arrange pour faire pencher la balance en leur faveur. Alors les avocats retors et de mauvaise foi, puisqu’ils sont bien payés pour cela, utiliseront toutes les ficelles et procédures que leur permet la loi qu’ils connaissent parfaitement pour faire traîner la décision finale. Ils feront appel du jugement, puis il iront en cassation. Si un nouveau jugement leur donne tort ils iront en cassation et ainsi de suite autant qu’ils le pourront. Ils feront ainsi traîner l’affaire pendant des années voire des décennies en espérant que les premiers plaignants meurent ou soient découragés. Les journaux en donnent fréquemment des exemples.

La justice des hommes n’est pas forcément injuste mais les capitalistes savent utiliser les moyens que leur permet la loi, avec la complicité des avocats, pour la faire échouer et la rendre ce qu’ils veulent, qu’elle soit juste ou injuste à leur gré, selon leur intérêt ! Il arrive aussi qu’à la longue ils échouent, mais ils auront gagné du temps !

Chronique N° 24 du vendredi 20 octobre 2017. A propos de Gauguin

L’origine des maux du monde (suite)

Je n’irai pas voir le film ‘Gauguin’. Pourquoi ?

Parce que ce que je sais du personnage me dégoûte. Pourquoi ?

Parce qu’il représente ce que je déteste le plus !

Qui était Gauguin ?

D’après ce que j’ai lu de lui il a commencé par bien boursicoter et gagner agréablement sa vie. Un jour il a rencontré un peintre qui l’a initié à son art et voilà notre personnage qui est victime d’une révélation : sa vocation c’est la peinture. A partir de ce moment il est devenu un homme ‘moderne’, libre dans sa vie comme dans son art. C’est à dire qu’il s’est cru obligé de faire n’importe quoi, façon anar, en se moquant totalement de la conséquence de ses actions sur les autres : « il est devenu un artiste ».

Le crime du mâle

Donner la vie, ce n’est pas faire un cadeau. Bien au contraire. Il en résulte que les parents n’ont que des devoirs envers leur progéniture. Ils doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour la protéger et l’aider dans la vie. C’est ce que font les parents responsables. C’est ce que ne font pas les autres, les égoïstes, en particulier des hommes. Celui qui va naître peut être handicapé à la naissance physiquement ou psychiquement. Même s’il est normal et intelligent il peut être soumis à toutes sortes de malheurs. Le seul fait d’être élevé par une mère abandonnée seule et sans défense plus ou moins miséreuse qui se trouve sous la pression d’une société dure et intolérante peut en faire un pauvre gosse et un adulte qui ne sera jamais bien dans sa peau, éternellement rancunier à l’encontre du monde qui l’entoure. Ce qui est une position parfaitement inconfortable dans la vie pour le semi-orphelin.

Aussi, à mes yeux donner la vie sans l’assumer est un crime presque aussi grave que de l’ôter par un meurtre.

Je sais que cette position n’est pas politiquement correcte car pendant des siècles jusqu’à aujourd’hui des hommes ont engrossé des femmes pour leur plaisir et ensuite se sont débinés, fuyant leurs responsabilités sans qu’on trouve à y redire sauf envers les femmes. Il représente l’égoïsme absolu des mâles, mais comme ce sont eux qui ont fait la morale, il n’y a rien à critiquer. Quand ils se comportent mal envers les femmes et ce qu’ils ont engendré en fuyant leur responsabilité, ils trouvent toujours de bonnes ou de mauvaises raisons pour se dédouaner car avec des mots tout est possible !

Il n’empêche que ce sont des salauds !

Et Gauguin là-dedans ?

La tradition nous dit que pour pouvoir barbouiller à son aise il a abandonné sa femme, ses cinq enfants et celui qu’il avait fait à une couturière parisienne pour aller jouer à l’artiste néocolonisateur pédophile, alcoolique, drogué et vérolé à Tahiti puis ensuite aux Iles Marquises pour finir par y crever comme une loque. Sa réputation aux Marquises est exécrable. La-bas, en plus de celui qui est reconnu, combien a-t-il laissé d’enfants illégitimes ?

Jean René Gauguin, un de ses fils, artiste céramiste lui-même, a dit qu’il ne pardonnerait  jamais à son père d’avoir abandonné sa mère et par conséquent sa progéniture dont il s’est probablement attiré la haine. On ne peut être plus clair sur la portée psychique de l’acte d’abandon.

Une femme, Laure Dominique Agniel, dans son livre ‘Gauguin aux Marquises, l’homme qui rêvait d’une île’ tente de réhabiliter l’homme. Elle prend sa défense : Gauguin ne buvait pas outre mesure, seulement un litre de vin par jour et un litre de rhum par semaine qu’il partageait avec ses amis, ce qui était quand-même suffisant pour le rendre alcoolique ; on a retrouvé de ses dents au fond d’un puits dont l’analyse atteste qu’il n’était pas syphilitique ; tout le monde là-bas était pédophile donc personne ne l’était parce que cela faisait partie des mœurs des colons et des naturels. Elle n’évoque pas l’abandon des enfants. C’est justement là où, pour moi, réside le crime du peintre.

Il a lui-même reconnu dans une lettre que les enfants n’étaient pas son problème mais plutôt un obstacle à sa vocation. Il est donc indéfendable : il a sacrifié des personnes au profit d’une lubie.

L’utilité de l’œuvre

La question que l’on peut se poser est : est-ce qu’au moins l’humanité a tiré un bénéfice de son comportement d’artiste asocial ? La réponse est non !

Sur le plan artistique je ne me prononcerai pas. L’art contemporain m’a tellement habitué à voir des ‘oeuvres’ qui sont objectivement des horreurs ou des barbouillages insignifiants glorifiées par toutes sortes de gens autorisées que je finis par les trouver agréables à regarder. Il en est ainsi pour les peintures de Gauguin. L’habitude est très mauvaise conseillère car quand on ne peut pas faire autrement on s’habitue à tout, même à l’odeur de la merde !

Van Gog n’a rien vendu de son vivant. Gauguin a vendu quelques peintures à des prix le plus souvent dérisoires si bien qu’il était en perpétuel manque d’argent donc de nourriture. Il ne faut pas oublier qu’à sa mort personne n’a cherché aux Iles Marquises à s’accaparer de son travail ou à le sauver en y voyant un monument ou un trésor. Et si un fonctionnaire nommé Victor Segalen, un peu branché et artiste, n’était pas passé par là par hasard tout aurait été perdu. L’humanité en aurait-elle été plus triste pour autant ?

On nous dit : sa peinture a ouvert la voie à d’autres artistes pour concocter l’art contemporain. Oui, et alors ? N’est-ce pas un peu dérisoire ? Non, proclament les parasites des gens très riches que sont les marchands d’art ! Ils ont raison. Ils ont pu faire fortune en vendant à des prix déraisonnables des oeuvres, tableaux (des croûtes ?) ou sculptures qu’ils avaient acheté pour des clopinettes. Il faut leur tresser des lauriers pour leur don de divination ou pour avoir su orienter le marché dans le sens qui leur convenait. Chapeau bas, messieurs dames, chapeau bas car le système continue !

Où est la vérité en matière d’art ? A l’époque du début des impressionnistes des gens se sont écharpés autour de leurs oeuvres puis les admirateurs de l’art ancien ont été disqualifiés. On les a classés dans la catégories des vieux schnocks rétrogrades admirateurs de l’art ‘pompier’ au nom de la modernité. Ils ont été balayés de la scène artistiques au profit de gens qui ont eu le droit de dire et de faire n’importe quoi pourvu que ce soit MODERNE, sélectionnés et encouragés par les marchands d’art. Il ne faut jamais oublier que les mots peuvent faire prendre des vessies pour des lanternes surtout en cette matière où il n’existe pas de vérité !

Si Gauguin était né un siècle plus tôt, il n’aurait jamais percé et aurait été enfoui au fond des oubliettes de l’histoire avec les médiocres. Il a peint au début d’une époque où tout était devenu possible. Comme Van Gog, il n’en a pas profité, mais son oeuvre a été portée aux nues par la postérité. Il a sacrifié ses enfants à la poursuite d’un rêve vide qui n’a pas modifié d’un iota la condition humaine. Il a seulement intrigué et amusé les gens ‘éduqués’, ‘cultivés’ et friqués et il continue. A-t-on le droit de le comparer à des types comme Pasteur, Flemming ou Crick et Watson et de faire autant de bruit autour de lui ?

De par sa notoriété, Gauguin fait partie à son échelle de ces personnages criminels tels Alexandre dit Le Grand, Louis 14 dit le Roi Soleil, ou Napoléon dit le Grand en opposition à l’autre dit le Petit, que l’histoire a retenus et glorifiés parce qu’ils ont ‘réussi’ une ‘oeuvre’ en oubliant ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui les dégâts collatéraux provoqués par leur existence.

Les gens modestes ont la vision sélective et la mémoire courte. Ils courent admirer dans les expositions, les musées, les monuments historiques comme le château de Versailles ce qu’il est convenu d’appeler des oeuvres d’art qui ont poussé sur une sorte de fumier constitué au cours du temps par leurs semblables spoliés, exploités et martyrisés.

Les capitalistes et l’art

Récemment un tableau de Gauguin a été vendus 300 000 000 $ (soit quinze mille années de salaire d’un employé payé au SMIC) à un émirat du Golfe. Comment justifier qu’un rectangle de toile barbouillé de la peinture de quelques tubes puisse atteindre une telle valeur ?

Parce qu’il représente le génie humain ? Il ne faut pas rigoler. Un ordinateur qui réalise des milliers d’opérations par seconde, un Airbus de plus cinq cents tonnes qui emporte des centaines de passagers sur des milliers de kilomètres, une sonde qui va visiter un satellite de Saturne après un voyage de plusieurs années, oui, ils représentent le génie humain !

Un tableau de Gauguin que je ne voudrais pas accrocher dans mes toilettes peut paraître amusant, intéressant, curieux mais certainement pas génial d’autant qu’il est probable que d’autres artistes ont pu faire le même genre de travail à la même époque sans qu’ils soient reconnus.

Aucun raisonnement logique ne peut justifier l’achat pour des millions d’euros d’une ‘oeuvre d’art’. Cela défie le bon sens des gens modestes. C’est de la folie pure et simple qui pourrait justifier un internement en hôpital psychiatrique. Des gens riches, super riches et hyper riches, des capitalistes sont fous : les sommes d’argent colossales qu’ils possèdent les rendent maboules.

Comment peuvent-ils justifier la ruine de milliers de gens qu’ils ont mis au chômage pour pouvoir acheter de pareilles offenses aux valeurs humaines ? Et pourtant ils ne manquent pas d’admirateurs et d’envieux dans toutes les classes de la société !

Ce que  j’écris, je le pense. J’en ai le droit car mes sentiments valent bien ceux de n’importe quel faiseur d’opinion reconnu pour son autorité !

Chronique 25 du vendredi 3 novembre 2017. Un conte

Conte de Noël et du Jour de l’An

Il était une fois un petit garçon qui s’appelait Jean-Charles. Souvent, son papa lui faisait traverser le zoo pour aller à l’école du village. C’était un zoo pas bien grand, la lubie d’un vieux fou plein d’argent qui en laissait de temps en temps le libre accès aux habitants de la commune. Il comptait plein de petits animaux à poils ou à plumes, exotiques, drôles ou sérieux que les gamins et gamines du village aimaient observer et exciter. Une girafe d’Afrique et deux gros tigres du Bengale qui faisaient peur aux petits enfants étaient les seuls gros animaux du zoo. A part la girafe qui gambadait en liberté dans l’immense parc de la propriété, tous ces animaux vivaient dans des cages assez grandes pour des cages, mais étriquées pour ces pauvres bêtes soustraites à leurs grands espaces dangereux, mais naturels.

Le père de Jean-Charles était ami du vieux fou. Les jours sans classe Jean-Charles avait l’autorisation de visiter tout seul le zoo, ce dont il profitait pleinement. Les petits animaux et la girafe ne l’intéressaient pas. Il se précipitait directement devant la cage des tigres à une distance respectueuse des barreaux car son père l’avait prévenu : « les tigres sont des animaux dangereux qui, en passant une patte à travers les barreaux, peuvent broyer une tête d’homme, mais aussi de femme, comme une cacahuète ». Il s’imaginait en cacahuète et ne s’approchait pas. Une fois arrivé à son poste il injuriait les bêtes de toutes les insultes humiliantes honnêtes et malhonnêtes qu’il connaissait, il leur tirait la langue, leur faisait des pieds de nez, il se contorsionnait en prenant des poses grotesques et les bombardait de cacahuètes pour voir comment ils les broieraient avec leurs pattes. Ce qu’ils ne faisaient jamais bien sûr.

Les tigres étaient bien nourris. Ils restaient longtemps couchés apparemment indifférents aux simagrées de l’enfant. Puis, au bout d’un certain temps l’un d’eux se relevait nonchalamment et se dirigeait vers le jocrisse, s’arrêtait le long des barreaux, et regardant le gamin droit dans les yeux poussait un feulement menaçant qui semblait dire : « espèce de lâche petit con, tu fais le malin parce que je suis derrière les barreaux. Mais attends qu’on me libère et tu verras ». Alors Jean-Charles s’en retournait à la maison, content de lui.

Les deux employés du zoo qui soignaient les animaux s’arrêtaient de travailler pour contempler les mimiques et les paroles du gamin. Ils en riaient très fort d’un gros rire gras ce qui l’encourageait à en faire toujours plus.

Jean-Charles vieillit. Il abandonna l’enfance et traversa l’adolescence pour arriver à l’âge adulte sans jamais oublier son petit plaisir qu’il pratiquait de plus en plus rarement, il est vrai. Il quitta son village pour la ville se maria et eut des enfants. Il était doué pour le dessin humoristique. Il avait de l’imagination et de l’esprit. Il concevait et réalisait des BD qui avaient du succès, ce qui lui permettait d’assurer un certain bien-être matériel à sa famille. Il publiait aussi des vignettes amusantes dans des journaux dans lesquelles ils se moquait des vedettes et des hommes et femmes politiques du moment.

A chaque fin d’année il retournait dans son village entre Noël et le jour de l’an pour passer les fêtes en famille. Il se rappelait son enfance et alors il ne pouvait pas s’empêcher d’aller en pèlerinage voir ses tigres. Ils avaient vieilli. Des poils blancs striaient leurs bandes noires. Le propriétaire, le vieux fou, avait vieilli lui aussi. Il était devenu plus vieux et plus fou.

Donc Jean-Charles allait voir ses tigres. Il ne leur tirait plus la langue. Il ne leur faisait plus de grimaces. Il ne se contorsionnait plus en postures grotesques. Mais quand même, par une sorte de défi imbécile il venait avec un manche à balai à l’extrémité duquel était enroulé une feuille de papier à dessin grand format sur laquelle était dessinée une scène humoristique où figuraient les tigres travestis en gentils animaux de boucherie ou de compagnie, chiens, chats, moutons, bœufs et même poules ou pigeons.

Il s’approchait sans précaution de la cage, enfilait son manche à balai entre deux barreaux et le tournait pour que le dessin se déroule dans la cage. Il restait à bonne distance des barreaux sous l’œil complice des deux employés qui avaient vieilli eux aussi, et qui ne rigolaient plus. Il agitait le dessin comme un drapeau en faisant des bruits avec sa bouche, ksss ! Ksss ! Kss ! Il leur adressait des paroles provocantes. Les pauvres vieux tigres le contemplaient d’un oeil morne du fond de leur cage. Puis, au bout d’un certain temps, l’un d’eux, agacé, se levait avec effort en luttant contre ses rhumatismes, s’approchait du drapeau et d’un coup de patte broyait le manche à balai et le dessin en regardant son bourreau avec l’air de dire : « tu es vraiment un pauvre type ». L’homme, qui ne savait pas lire dans le regard du tigre, regagnait la maison, content de lui.

Cette année-la Jean-Charles venait d’avoir trente ans. Depuis quelques mois une femme avait remplacé l’un des employés du zoo parti en retraite. Elle était naturopathe, végétarienne, végétalienne et végane, ce qui n’est pas rien. C’était une ‘ayatollah’ de la condition animale et du retour à la nature. Elle avait fait plusieurs séjours en hôpital psychiatrique pour divers méfaits pas bien graves comme d’attaquer un boucher à coups de couteau par exemple. A chaque fois les psychiatres experts spécialistes qui ne se trompent jamais l’avaient jugée guérie et l’avaient autorisée à courir la nature, les rues des villes et les routes des campagnes.

Or donc, ce matin-là Jean-Charles partit en pèlerinage comme chaque fin d’année avec un manche à balai tout neuf et son nouveau dessin roulé à une extrémité. Quelle ne fut pas sa surprise en entrant dans le zoo de voir tous les petits animaux en liberté. Les oiseaux s’étaient envolés. Il n’y avait plus personne dans les cages. Inquiet, il se dirigea vers la cage des tigres et poussa un ouf de soulagement. Les tigres étaient à leur place comme d’habitude. Un peu troublé quand-même par ce qu’il avait vu en entrant dans le zoo il reprit son manège habituel et commença à exciter les deux animaux avec des ksss ! Ksss ! Ksss !

Avant qu’il ait réalisé ce qui se passait, l’un des tigres, malgré ses rhumatismes, se leva d’un bond, traversa la cage en deux enjambées, poussa la porte entrebâillée, ce que Jean-Charles dans son émoi n’avait pas remarqué, sauta sur l’homme en abattant l’extrémité d’une patte et ses griffes sur son crâne. Dans le regard de la bête on pouvait lire : « tu t’es foutu de moi pendant des années. Tu te croyais bien à l’abri. Maintenant tu vas payer ! », en ajoutant : « joyeux Noël et Bonne Année ! ».

Et Jean-Marc eut la confirmation qu’un tigre sera toujours un tigre et qu’il peut broyer la tête d’un homme d’un coup de patte, comme une cacahuète.

Comme le dit si justement Attara Coquenbusch dans son essai ‘Au revoir Cocodoo la Baya’ : « même d’un malheur on peut tirer une leçon, à condition de le vouloir … et de le pouvoir ! ».

Chronique N°26 du vendredi 17 novembre 2017. Parasites et capitalistes

L’origine des maux du monde (suite)

Nous avons vu qu’à partir du moment où les nomades se sont sédentarisés les sociétés se sont divisées en deux catégories, les dominants et les dominés. Des malins comme il en existe partout et en tout temps quand les circonstances sont favorables ont su, soit par la flatterie soit parce qu’ils avaient un talent particulier qui plaisait aux puissants, s’attirer leur grâce échappant ainsi au sort commun des malheureux dominés. Il y en avait du temps des pharaons. Sous l’ancien régime ils constituaient la cour des rois. C’étaient les parasites des riches. Qu’en est-il aujourd’hui ?

Qu’est-ce qu’un parasite ?

En biologie on appelle parasite une espèce qui vit fixée sur une autre et à ses dépens, appelée hôte. Il y a une foule de parasitismes qui sont des hymnes à l’inventivité de la nature. Exemples :

– le gui est un parasite du pommier ou d’autres arbres,

– les puces et les poux sont des parasites des animaux à sang chaud,

– les virus et les bactéries pathogènes sont des parasites responsables de maladies qui peuvent tuer leur hôte,

– le minuscule mâle d’un poisson des abysses vit fixé sur la femelle et en tire sa nourriture,

– etc. …

Certains parasites offrent à l’hôte autant qu’ils en reçoivent dans une association durable. On parle alors de symbiose entre le parasite et l’hôte. Exemples :

– les lichens sont une symbiose entre une algue et un champignon,

– les milliards de bactéries de nos intestins vivent en symbiose avec notre corps.

– les vaches et les termites digèrent la cellulose grâce aux bactéries qu’elles abritent dans leur intestin ,

– etc. …

Il ne faut pas confondre les parasites et les prédateurs. Si l’on excepte l’homme qui s’attaque aux éléphants et aux baleines, les seconds sont souvent plus gros que leurs proies surtout s’ils chassent en bande. Exemples :

– le brochet bouffe les petits poissons,

– les lions chassent les herbivores en meute,

– etc. …

Les parasites dans la société

Le parasitisme existe à tous les niveaux de la société. Il y a le parasitisme légal. Celui des banques par exemple. L’état oblige les simples citoyens a avoir un compte en banque et les banquiers en profitent pour vivre à leurs dépens en trouvant mille moyens de leur soutirer des sous, sous prétexte qu’ils rendent des services. Lesquels services sont fabriqués pour créer artificiellement des besoins. Sans compter avec les pénalités élevées plus ou moins arbitraires qui peuvent soustraire de l’argent à des pauvres gens maladroits qui n’en ont déjà pas trop. Les banquiers peuvent même se transformer en prédateurs comme aux USA avec des comportements qui ont conduit à la crise des subprimes en ruinant des clients sans défense. Et en même temps ils se sont comportés en parasites de la société américaine puisqu’ils ont été renfloués par les impôts payés par les citoyens.

En cherchant bien, on trouve une foule de parasites légaux, par exemple dans les universités. Ils vivent sur le dos de la société en se faisant plaisir à étudier des choses minuscules sans intérêt pour elle. Il y en a d’autres comme ces gens payés grassement pour siéger dans des commissions dont l’avis n’est que consultatif, c’est à dire que leurs rapports sont soumis au classement vertical (la corbeille à papier ou le fond d’un tiroir). Ce sont des emplois qu’on appelle vulgairement des fromages ! Ils sont généralement obtenus par copinage avec des hommes politiques.

Il y a le parasitisme illégal comme le racket. Les escrocs sont des parasites des individus, des entreprises ou des états. On en trouve à tous les niveaux de la société. Il y en  même qui escroquent les clochards. Quand ils se font prendre, ils sont généralement punis, mais plus ils ont un statut élevé et moins la sanction est forte en valeur relative. C’est ce qu’on appelle ‘la délinquance en col blanc’.

En théorie tous les acteurs de la vie sociale devraient vivre en symbiose les uns avec les autres. C’est ce qui se passe aux petits échelons locaux : le maraîcher cultive les légumes qu’il vient vendre sur le marché. Le client ou la cliente le paie. C’est un échange équitable. Les deux y trouvent leur compte. Il y a symbiose !

Le petit artisan emploie quelques ouvriers. Il leur fournit honnêtement le moyen de gagner leur vie. En échange les ouvriers mettent leur compétence ou leur force musculaire au service du patron et de la société. Si le patron est juste, le partage est équitable. Il y a symbiose !

Par contre les grandes entreprises et les multinationales ne vivent pas en symbiose avec le personnel de base. Elles vont là où il est le moins cher pour l’exploiter, lui sucer le sang avec l’espoir de le remplacer un jour par des machines afin de verser un maximum de dividendes aux actionnaires, c’est à dire d’enrichir toujours plus les riches, les super riches, les hyper riches. C’est tout le contraire de la symbiose. C’est du parasitisme pur et dur qui frise la prédation.

Les capitalistes ont-ils des parasites ?

Sans aucun doute. Ils sont faits exactement comme les autres humains. Ils ont des bactéries dans les boyaux, ils peuvent attraper des tiques, des puces, des maladies sexuellement transmissibles, champignons, bactéries et virus pathogènes, etc. … Ce n’est pas ce parasitisme là qui m’intéresse. C’est le parasitisme des parasites qui s’attaquent à l’argent, à la fortune des possédants.

Il y en a deux types.

Il y a ceux qui vivent en symbiose avec eux parmi lesquels on peut citer les gagne-petit qui ont une vie matérielle agréable, sans plus, comme :

– les ‘bons économistes’, ceux qui justifient à longueur d’année la croissance injustifiée de la richesse des capitalistes,

-les ‘bons journalistes’ qui la glorifient,

-les ‘bons hommes’ politiques qui la favorisent,

-les cadres moyens des multinationales dont le rôle est de faire transpirer les employés pour pousser à l’augmentation des dividendes. Ils transpirent eux-mêmes.

Ensuite on trouve les cadres supérieurs des multinationales et parmi eux leurs chefs, qu’ils se nomment PDG ou autrement qui gagnent plus qu’ils ne peuvent dépenser. Ils ont la tâche de mettre au point des stratégies pour augmenter les dividendes comme par exemple de mettre des salariés au chômage en délocalisant ou en introduisant toujours plus de numérique dans l’entreprise.

L’autre moyen de faire croître la fortune des capitalistes est la spéculation, c’est à dire de gagner de l’argent avec de l’argent sans rien produire. Ils ne le font pas eux-mêmes. Ils confient cette tâche à des spécialistes de l’informatique qui fabriquent des logiciels adaptés et à d’autres qui les utilisent, les traders, pour surveiller les variations de la valeur des monnaies, des marchés d’actions et de matières premières.

Les cadres dirigeants comme les traders sont des parasites utiles aux capitalistes puisqu’ils les aident à augmenter leur fortune, lesquels en échange de leur travail leur accorde des miettes de leurs gains sous la forme de salaires, de stock options et de primes qui se comptent en millions, et même en dizaines de millions de dollars chaque année. Il y a donc bien symbiose entre tous ces gens.

Les vrais parasites des capitalistes

Ce sont les gens qui leur piquent du fric en leur donnant en échange une illusion : celle de posséder une partie du monde, qui n’est pas complètement fausse, d’ailleurs. Le fait d’être hyper riches leur fait perdre la notion de la valeur des choses. Les vrais parasites en profitent.

Parmi les hors la loi il y a les maître chanteurs, les escrocs et les faussaires de toutes sortes qui parviennent à tromper leur vigilance et à vivre momentanément ou durablement sur la bête. De temps en temps ils se font, épingler, cela fait partie des faits divers.

Alors, je jubile que ces gens aient réussi à soutirer du fric à d’hyper riches nantis et je déplore qu’ils se fassent prendre. Il est probable qu’on ne sait pas tout car le riche qui se croit malin n’aime pas faire savoir qu’il a trouvé son maître. La plupart des escroqueries doivent rester cachées.

Ensuite il y a les parasites légaux. De même que beaucoup de fortunes s’alimentent de la société de consommation qu’elles ont initiées dans le temps, les parasites légaux sont des malins qui poussent les gens friqués à consommer des objets ou des services hors de prix conçus spécialement pour eux.

La palme revient aux marchands d’art qui leur fourguent des ‘oeuvres d’art’ à des prix impossibles qui se chiffrent en dizaines de millions de dollars, voir en centaines de millions (par exemple un tableau de Gauguin). J’ai déjà dit dans d’autres chroniques ce que j’en pensais. Je me répète. Je gâtouille, c’est de mon âge. Cela flatte nos gens friqués de posséder des oeuvres d’artistes célèbres, et en même temps ils sont fiers de leurs placements qui peuvent se révéler de bonnes affaires spéculatives. Ils n’admirent pas forcément ce qu’ils achètent. Ils continuent seulement à ‘faire des affaires’.

Les gens riches, super riches et hyper riches veulent vivre dans l’ultra confort. Ils n’aiment pas se mélanger à la plèbe et beaucoup jouissent d’étaler leur fortune ou au moins faire en sorte que ça se voit. Des malins leur proposent donc des moyens de répondre à leurs vœux. Ce sont les marchands de bien et les gérants de l’industrie du luxe. Les uns leur procureront des villas de cinquante pièces avec cent salles de bain qui ne serviront jamais, dans des lieux qu’ils diront paradisiaques. Les autres leur présenteront des suites dans des palaces à plusieurs milliers de dollars la nuit.

Ou des montres mécaniques qu’ils appellent des ‘garde-temps’, avec plein de fonctions inutiles, à des prix exorbitants alors que pour quelques dizaines de dollars on peut s’en procurer qui donneront l’heure avec une précision inégalée.

Ou des bagnoles rouges ou jaunes avec des moteurs de cinq cents chevaux qui peuvent rouler à plus de 300 km/h, que l’on conduit couché, pour se promener sur des routes à la vitesse limitée.

Ou des yachts monstrueux avec des équipages pléthoriques que l’on occupe en moyenne quelques jours par an et qu’on loue à d’autres riches le reste du temps.

Ou des avions dont on ne se sert pratiquement jamais mais qui entretiennent le plaisir de posséder.

Je ne parle pas de la ‘haute couture’ ou de la ‘haute joaillerie’ qui sont de bons moyens d’amorcer la pompe à fric qui va faire des petits trous dans les grandes fortunes pour ne donner en échange qu’une médiocre satisfaction d’orgueil et d’amour propre à leurs propriétaires. Le tout sous l’admiration des gogos.

Les ‘bons économistes’ nous disent que cela fait marcher l’économie pour le bien de tous. Laissons-les dire et n’en croyons pas un mot !

Les capitalistes pour acquérir, faire grossir et conserver leur fortune écrasent en permanence les pieds des voisins et des états. Ils doivent la défendre constamment des attaques des mêmes voisins et des états qui la convoitent. Ce rôle de gardien et de défenseur de la fortune du malheureux capitaliste (prions pour lui) est dévolu à une autre catégorie de parasites légaux. Elle est constituée par les avocats dits d’affaire et les conseillers fiscaux. Surtout aux USA, ils usent et abusent de leur importance théorique pour soutirer un maximum de fric aux capitalistes qu’ils sont censés conseiller et protéger.

J’allais oublier les femmes qui réussissent à se faire épouser par des milliardaires. Si elles s’y prennent bien pour se faire virer, leurs vieux jours sont assurés : elles partent avec des miettes des fortunes qui satisferaient la plupart d’entre nous.

Chacun leur pique du fric comme il peut, où il peut avec ses faibles moyens !

Donc, si vous adorez l’argent et ce qu’il procure, si vous êtes prêt(e) à abandonner toute dignité pour lui, si vous savez êtes flatteur (euse) à bon escient, si vous êtes malin ou maligne, si vous avez de l’imagination, si vous présentez bien, si vous avez de beaux yeux et de belles dents, si vous n’avez pas mauvaise haleine, si vous êtes jeune et dynamique, si vous êtes sans scrupule, si vous n’avez pas peur de la prison, si vous êtes prêt(e) à perdre votre chemise, si vous avez quelques dons artistiques, si vous êtes patient(e), si vous êtes comédien(ne), si vous êtes entêté(e), si vous êtes téméraire et cependant plein(e) de tact, alors engagez-vous dans la carrière de parasite des capitalistes. Ça peut rapporter gros.

Et si vous êtes vieux, gros et chauve ? Ne désespérez pas, même aussi mal pourvus, il y en a qui réussissent quand même s’ils savent inspirer confiance, il suffit d’être malin et d’avoir du culot !

Chronique N°27 du vendredi premier décembre 2017. Les capitalistes, le superflu et le gaspillage

L’origine des maux du monde (suite)

Autrefois, du temps de l’économie de subsistance, dans le monde paysan qui représentait quatre-vingt pour cent de la population et qui se nourrissait de son travail, rien ne se perdait, il n’y avait pas de gaspillage. Le dicton : « dans le cochon tout est bon » résumait la situation. Les habitants des villes comme par exemple les artisans connaissaient la valeur des choses. Ils faisaient attention. On récupérait même les vieux chiffons pour faire du papier. Il n’y avait guère que les nobles et les bourgeois très fortunés pour gaspiller. Encore faut-il s’entendre sur le mot gaspillage.

Aujourd’hui, c’est autre chose. Tout le monde gaspille sans s’en rendre compte, sauf les très pauvres et encore !

Le nécessaire, le superflu et le gaspillage.

La notion de nécessaire est variable dans le temps et l’espace. Pour les premiers habitants des pays tempérés qui vivaient en tribus plus ou moins nomades, l’indispensable c’était ce qui permettait de survivre, la nourriture, la protection contre les éléments agressifs, animaux, froid, chaleur, vent, pluie, les voisins et ce qui rassure, les rites et les cultes.

Avec la sédentarisation et le partage des sociétés en deux couches, les gens de la couche supérieure ont laissé à ceux de la couche inférieure le soin de leur procurer et confectionner le nécessaire : nourriture, abris, vêtements, en échange d’une protection aléatoire contre certains dangers, essentiellement contre les étrangers. Des malins, artistes, inventeurs et imaginatifs, ont proposé aux puissants des moyens de leur rendre l’existence plus agréable soit en améliorant la vie domestique, soit en enrichissant leur décor, soit en leur procurant des divertissements. Ce fut la naissance du superflu.

Le superflu est ce qui aide à vivre. C’est une notion tout à fait relative. En effet, hier, ce qui était considéré comme du superflu par les malheureux de la couche inférieure se révélait être indispensable aux yeux des ‘élites’ de la couche supérieure qui regardaient comme normal de vivre dans le confort dans des palais dorés. Cette dernière vision est partagée, au nom de la culture, par les intellectuels d’aujourd’hui situés dans la couche ‘heureuse’.

Le superflu est-il du gaspillage ?

Qu’est-ce que le gaspillage ? La notion de gaspillage est liée à la morale : est-ce bien ou mal de détourner un bien ou une ressource naturelle pour la consommer ou la détruire par caprice alors que des gens manquent de tout ? Dans le temps, dans le peuple on entendait des mères dire à leurs enfants : « ne gaspillez pas la nourriture pendant que des enfants meurent de faim dans le monde ». L’entend-on encore aujourd’hui ?

La réponse dépend de la position que l’observateur (trice) occupe dans la société et de son échelle de valeurs.

Prenons un exemple. Dans l’ancien régime les rois avaient plus d’une maison qu’on appelle château. C’était le cas de François Premier. En se promenant dans ‘ses’ bois de Sologne, il aperçut un jour une zone marécageuse dégagée avec en son centre un petit château. « Tiens, tiens, dit-il, construire ici un grand château plein de tourelles, de cheminées et d’architecture à l’italienne, voilà une idée formidable ! Ça fera comme le château de la belle au bois dormant au milieu des bois avec plein de loups, de biches, de cerfs, de chevreuils, de lapins et de corbeaux qui viendront l’admirer. Et puis qu’est-ce que ça va épater le voisin et le vilain ! ». Cette phrase est bien sûr un raccourci. Un château de plus pour ce roi, c’est du superflu

Et en 1519, la construction, c’est parti. En 1539 une partie habitable par le roi est terminée. Entre temps un mur d’enceinte de 32 kilomètres qui entoure un parc de 50 kilomètre carrés est élevé.

Et entre 1539 et aujourd’hui, soit pendant presque cinq cents ans, ce lieu sublime a été habité réellement pendant une quarantaine de jours par François Premier l’initiateur du projet, et pendant un an ou deux d’occupations cumulées par ceux auxquels il était destiné c’est à dire les rois, leurs frères et leurs cousins.

Autrement dit les milliers de tonnes de pierre taillées transportées sur des kilomètres par eau et par terre avec des moyens dérisoires, empilées par des milliers de maçons pendant des années n’ont servi à rien sinon à provoquer l’admiration des (j’ai envie de dire ‘des imbéciles’ ce qui n’est pas politiquement correct et qui concerne trop de monde) intellectuels bien placés dans la société et chantres des puissants et de la ‘culture’. François Premier, ses descendants et les intellectuels n’ont jamais considéré que ce superflu est du gaspillage. Moi, si ! C’est mon droit ! Combien d’autres pensent comme moi ?

Les défenseurs de cet immense gâchis diront comme pour les pyramides que cette construction révèle le génie et la grandeur de l’esprit humain. Je leur rétorque que ce génie et cette grandeur de l’esprit humain ont été bien mal employés !

Ce château est notre pyramide, c’est à dire une dépense de matière première et d’énergie, due au caprice d’un seul, considérée comme un exploit, alors qu’il n’est que le résultat de l’exploitation sans vergogne de gens malheureux constitutifs de ce qu’il est convenu d’appeler ‘le peuple’. C’est de la sueur, du sang et des larmes tirées des paysans et des ouvriers qui, habituellement, n’étaient déjà pas gâtés par la vie. Toute cette misère n’est pas quantifiable et n’a pas laissé de trace. Il ne faut pas en parler ni même l’évoquer.

Elle n’en a pas moins existé. Il n’en reste visible que le résultat qui n’a servi à rien. On a utilisé des ressources humaines (comme on dit aujourd’hui) pour satisfaire le caprice d’un monarque. Je pense que ce n’est pas bien, que ce n’est pas moral, et que par conséquent le château de Chambord est le symbole même du gaspillage que se sont permis les puissants au cours de l’histoire.

C’est un avis de PéPé !

Les riches, le superflu et le gaspillage

Une fois que les besoins élémentaires sont satisfaits par les moyens qu’offre notre civilisation, la plupart des gens veulent agrémenter leur vie afin qu’elle ne soit pas seulement consacrée au labeur et à la survie pure et simple qui ne sont pas toujours drôles, mais qu’elle soit le plus agréable possible. C’est là qu’intervient le superflu, dont certains disent qu’il est nécessaire, alors que d’autres savent s’en passer.

Pratiquement tout le monde à un moment ou à un autre de son existence a acquis du superflu dans la mesure de ses moyens et même au-delà pour se divertir. Ce superflu peut être virtuel comme le théâtre, la musique ou concret comme une canne à pêche. C’est un besoin pour se sentir bien vivre.

Nous vivons aujourd’hui dans un monde dévoyé où une certaine propagande s’obstine à nous faire oublier ce qui est essentiel et à nous faire croire (et elle réussit en partie auprès de certains) que le bonheur est dans le superflu et seulement là. C’est ce qu’on appelle la société de consommation qui essaie de nous faire vivre dans une insatisfaction permanente. Elle est initiée par les riches pour s’enrichir toujours plus.

Le malheureux pêcheurs du dimanche, convaincu par la pub, achètera tous les ans une nouvelle canne à pêche qui sera sensée être plus souple, plus résistante, plus brillante, plus ceci ou plus cela que la précédente. Il ne prendra pas plus de poissons, mais il n’aura pas l’air ringard. S’il n’a pas de place chez lui, les plus anciennes iront à la poubelle. Le superflu s’est transformé en gaspillage.

Qu’en est-il pour les riches, les super riches et les hyper riches ? Les capitalistes, quoi !

Ils peuvent se payer tout le superflu qu’imposent leurs caprices et leurs caprices sont infinis. Et comme ils n’ont qu’une vie ils ne peuvent pas consommer tout le superflu qu’ils achètent. Que devient-il ? Il est mis à la poubelle d’une façon ou d’une autre alors que sa valeur aurait pu venir en aide aux gens qui n’ont rien. D’ailleurs les riches ont de gigantesques poubelles !

D’après la revue ‘Moteur Boat’ deux cent mille capitalistes dans le monde sont assez riches pour acheter un yacht de cent mètres de long au prix de 275 000 000 $ avec cinquante membres d’équipage qui coûte 1 400 000 $ par an. Pour posséder un tel bateau il faut un revenu annuel de 30 000 000 $ par an. Ce qui ne signifie pas que tous ceux qui peuvent le faire le font. Enfin, toujours cette même revue indique qu’un yacht de soixante dix mètres de long consomme cinq cents litres de carburant à l’heure. Il consomme en deux heures ce que je consomme avec ma voiture en un an. Quelle consommation pour un yacht de cent mètres ou plus ?

Dans le même esprit, un avion privé Falcon consomme plus de mille litres à l’heure.

Dans un cas comme dans l’autre, même si le propriétaire emmène d’autres personnes avec lui dans ses voyages, l’utilisation de ses véhicules ne dépend que de ses seules caprices pour se déplacer en emmenant du monde dans des voyages d’utilité discutable. La possession de ces engins est le comble du superflu.

Dans le même esprit encore un milliardaire français s’est fait construire une villa (un château ?) de 4000 mètres carrés sur un terrain de 180 hectares à côté de Londres. Ce n’est qu’une de ses résidences. Comment va-t-il faire pour occuper toute cette surface ? De quoi profite-t-il ?

Pour les dédouaner les économistes à leur botte proclameront que la construction, l’entretien et le fonctionnement de ces machines et de cette villa fait marcher l’économie et donne du travail aux salariés. En réalité pour leur construction il a fallu soustraire de l’énergie et des matériaux au bien commun de l’humanité et pour l’aménagement du navire et de la maison il a fallu acheter du bois précieux de contre-bande obtenu par la déforestation de forêts dans des pays pauvres (pardon ce n’est pas politiquement correct, il faut dire pays en voie de développement) et extraire, faire tailler et voyager des marbres de luxe à travers le monde ce qui n’est pas très écologique. Tout ça pour le plaisir d’un seul.

Comme François Premier ces riches considèrent que le superflu qu’ils s’accordent est légitime, l’un parce que c’est ‘de droit divin’, les autres parce que, à cause de leur fortune, tout leur est dû, ce qui revient au même.

En occident, le confort, ce superflu devenu nécessaire s’est démocratisé au cours des deux derniers siècles. Aujourd’hui presque tout le monde aspire à vivre en bourgeois petit ou grand. Malheureusement on est loin du compte parce que les nantis qui possèdent la moitié des richesses du monde aspirent à en posséder la totalité pour se payer encore plus de superflu.

Ce n’est pas bien de posséder ce superflu dont l’utilité frise le zéro alors que des gens de nos sociétés vivent dans la misère et l’angoisse du lendemain. Ce n’est donc pas moral. C’est donc du gaspillage quoi qu’en disent les économistes et tous les parasites des capitalistes.

Qu’est-ce que le gaspillage aux yeux des riches ?

Voilà une bonne question qui ne se posait pas sous l’ancien régime puisque la séparation des riches et des pauvres était l’œuvre de Dieu. La notion de gaspillage chez les nantis n’existait même pas. Puis les Lumières sont arrivées et ont mis le doigt où ça fait mal. On a parlé de progrès, d’injustice, d’égalité, de fraternité et de démocratie et jusqu’à récemment en occident après bien des aléas, petit à petit le sort des moins favorisés par le sort s’est amélioré. Puis aux USA les riches ont pris le pouvoir et ont revendiqué le droit de plumer le monde à leur profit par tous les moyens en se moquant pas mal de la morale. Ils ont institué le libéralisme mondial ou mondialisation. Ils ont utilisé la pauvreté de certains peuples à leur profit et l’ont étendue en occident sous prétexte de moderniser l’économie. Leur enrichissement s’appuie en partie sur l’augmentation du nombre de pauvres en occident par l’extension du chômage.

Et alors quel rapport avec la question posée ?

Apparemment aucun parce que ma notion de gaspillage diffère de celle des riches.

Il n’y a pas de plus grand gaspillage aux yeux des riches que de prélever une partie de leurs gains et de leur fortune par l’impôt pour nourrir ces feignants que sont les pauvres … qu’ils ont contribué à mettre sur la paille.

La preuve : ils se débattent comme de beaux diables pour mettre leurs biens à l’abri du fisc en les planquant dans des paradis fiscaux et ils influent sur les politiques pour que les états diminuent par tous les moyens les dépenses publiques.

En effet, quel gaspillage que de voler (c’est immoral) leur bel argent pour construire et subventionner des hôpitaux qui coûtent presque aussi cher qu’un yacht et qui servent à soigner les gens qu’ils ont empoisonnés ! ! !

Chronique N°28 du vendredi 14 décembre 2017. Quoi de neuf chez le PR ?

L’origine des maux du monde (suite)

Je fais partie des pauvres types terre à terre, feignants, lâches qu’on croise dans les gares et qui ne sont rien. C’est le Président de la République (PR) française qui le dit. Il me juge, de quel droit ? Il n’est pas juge de droit divin. Pourquoi ne le jugerai-je pas à mon tour d’après ce qu’il me montre de lui à travers ses paroles et ses actions ?

A ses yeux n’ont de valeur que ceux qui font ‘avancer l’économie’, les agités du bocal, les requins, les crocodiles et les rapaces de toutes sortes. Est-il souhaitable que le monde entier se transforme à tous les étages de la société en un gigantesque panier de crabes pour que nous vivions heureux ?

Je suis content de ce que je suis et de ce que j’ai. Je n’aspire qu’à satisfaire trois trinités : ‘luxe, calme, volupté’ et ‘plaisir, joie, bonheur’ en profitant de ce que le vrai progrès m’a donné. Heureusement que la majorité des gens est comme moi, calme, pondéré et qui sait se contenter d’un peu qui est déjà du luxe : manger à sa faim, avoir un toit, des vêtements adaptés aux saisons, profiter du confort permis par le progrès, jouir du temps libre et d’un peu de superflu dans un entourage amical sans arrière pensée, le tout dans la paix et la liberté. Combien de personnes dans le monde et même en France y aspirent et n’y ont pas accès ?

Qui a dit que nous sommes sur la terre pour vivre comme des fous à rechercher toujours plus ? Ce qui devrait compter pour une personne civilisée sage, c’est d’avoir une vie sociale, c’est à dire de faire sa part, comme dit le colibri, et en échange recevoir de quoi vivre dignement. Ce serait un partage équitable.

C’est ce qui se passe un peu avec les éboueurs et les égoutiers. Ils nettoient la merde de la société et en échange ils reçoivent un salaire de sa part, un peu chiche vue l’utilité du travail fourni, qui leur permet de pourvoir à un nécessaire minimum. C’est un bon système qui, en théorie, devrait s’étendre à toute la société.

Malheureusement il y a les malins ambitieux qui veulent tirer la couverture à eux ! Ils sont relativement peu nombreux. Heureusement ! On dit qu’ils représentent un pour cent de la population mondiale et qu’ils possèdent la moitié des richesses du monde. Ils voudraient posséder toutes les richesses de l’univers. Ils réussissent à brouiller les cartes en faisant croire qu’ils sont indispensables à la société et que, par conséquent, ils méritent beaucoup

Et tout un tas de parasites du système qui aident les riches à devenir plus riches se sucrent au passage. Par exemple un directeur de banque touche un salaire compris entre dix et cent fois celui d’un éboueur. Et pourtant, supposons que l’on coupe la tête de tous les éboueurs et de tous les directeurs de banque avec interdiction de les remplacer. Qui manquera le plus à la société ?

C’est un point de vue ! C’est mon point de vue ! Et c’est, je pense, celui de la majorité des gens simples partout à travers le monde : vivre tranquillement et honnêtement de son travail.

Ce n’est pas celui de ‘l’élite’ et du PR !

Qui est le PR ?

J’ai formé mon opinion lorsque avant les élections présidentielles il a dit : « je souhaite que beaucoup de jeunes veuillent devenir milliardaires ». En énonçant cette pensée profonde il encourageait probablement les créateurs de start-up.

Or que sont les start-up ? Des entreprises dont le but est de créer de l’innovation pour l’innovation et d’en tirer un profit pécuniaire. Certaines innovations sont utiles qui débouchent sur des applications médicales, d’autres sont superflues ou folkloriques comme la fourchette connectée et d’autres carrément sont anti-sociales lorsque leur but déclaré est de remplacer les salariés par de l’intelligence artificielle. Ces innovations que notre PR révère et assimile au progrès n’ont pas pour but de soulager la misère humaine mais de ne pas perdre pied dans la concurrence mondiale devenue folle en fabriquant du mercantile à base d’inutile et accessoirement de mettre des gens au chômage pour que les riches s’enrichissent toujours davantage. D’autant que les start-up ne sont pas des entreprises idylliques pour les gens qui y travaillent. Ce sont donc ces gens que le PR soutient et admire parce qu’il soutient ce qu’il appelle le ‘progrès’.

Il les appelle les premiers de cordée, ce qui est à la fois une très bonne image parce qu’elle reflète bien sa pensée et une très mauvaise de sa politique parce qu’elle dément ses paroles et renvoie au monde dans lequel nous vivons et qui ne risque pas de s’améliorer. Au pied du Mont Blanc on voit les cordées qui s’attaquent à la montagne. Les premiers de cordée entraînent effectivement des petits groupes de gens qui rêvent d’arriver au sommet. Ils laissent dans la vallée l’immense majorité de la population qui les regarde partir pour quelques-uns avec envie, pour les autres dans l’indifférence la plus totale parce que la ‘conquête de l’inutile’, comme disait un alpiniste qui a perdu ses orteils dans l’ascension de l’Everest, ne les intéresse pas.

Peut-on reprocher à des gens de ne pas aimer l’escalade ? De ne pas aimer risquer de se casser la gueule dans une crevasse ? Oui dit le PR, et il pense même qu’il faut les en punir !

Croit-il à l’argument mille fois entendu que la suppression des emplois due au numérique est compensée par la création d’emplois par le numérique ? Les statistiques prouvent le contraire : le nombre de postes de travail diminue sans cesse si bien que le nombre de gens sans emploi et par conséquent de pauvres augmente régulièrement depuis des années.

Croit-il que les chômeurs sont responsables de leur état en s’y complaisant puisqu’il veut renforcer leur contrôle alors qu’il n’y a pas assez de postes de travail pour les employer ?

Croit-il en ce qui a toujours échoué : transformer par des stages de formation de quelques mois dans des officines plus ou moins sérieuses, des chômeurs de milieux modestes, avec de faibles bagages intellectuels, en super techniciens qui répondraient aux offres du marché du travail, alors que les gens qui occupent des poste équivalents ont suivi des années d’étude. De plus, la possibilité d’embauche de ces chômeurs s’ils étaient bien formés serait marginale par rapport à la demande et ne résoudrait donc pas le problème du chômage dans son ensemble.

Croit-il à la théorie du ruissellement : plus la richesse aspirée par les riches avides de fric monte vers le haut de la pyramide sociale et plus elle redescend pour arroser la base de la pyramide, comme le fait une fontaine avec l’eau. Qui peut croire à cette baliverne ?

Croit-il que le progrès qu’il prône est bon pour tous ?

Croit-il en tout cela ou veut-il simplement nous y faire croire ?

Il a été élu mais il n’y a pas de quoi pavoiser : au premier tour des élections présidentielles il n’a obtenu que 18 % du corps électoral et au second tour seulement 43 % de ce même corps devant le repoussoir FN, et, ce qui est encore pire, ses députés ne représentent que 16 % des inscrits. Quelle est sa réelle légitimité pour tout chambouler ?

Cependant il se sait jeune, beau, intelligent, malin, dynamique et plein d’allant. On le lui a dit et on le lui répète. Il en est donc persuadé. De plus sur un coup de dé dont il est fier il a cassé la baraque, bousillé le PS, vaincu LR, envoyé le FN dans les cordes, découragé LI. Il ne se sent plus de joie !

Comme toute personne normalement constituée il agit sous l’influence de ses sentiments. Son succès (et peut-être aussi les flatteries) lui ont donné un sentiment de toute puissance et d’invulnérabilité. Il se croit tout permis (d’où l’épithète de jupitérien dont on l’affuble) et il se permet tout sans rencontrer de résistance tant ses opposants ont été sidérés par son audace ! Il me fait penser à un autre PR qui l’a précédé, qui avait le même état d’esprit, et qui a fini par lasser même ses partisans.

Il se dit ni de droite ni de gauche. Ses réformes en chantier ou prévues ne sont-elles pas celles d’un homme qui a une mentalité de droite pure et dure déguisé en centriste ? Ne mérite-t-il pas son surnom de Président des Riches ?

Ceci expliquerait en partie la passivité actuelle de la droite devant un homme qui a réussi en quelques mois là où elle a échoué pendant des années même si pour la forme elle fait semblant de le critiquer.

Quel est le projet du PR ?

Quand j’observe ses ordonnances sur la loi travail qui détricotent une partie des lois de protection sociale favorables aux travailleurs durement acquises au cours des temps et les facilités fiscales accordées aux entreprises et aux riches je ne peux pas m’empêcher de formuler une hypothèse sur son projet en deux temps.

Premier temps : les capitaliste, étrangers ou non, ont peur d’investir chez nous parce qu’ils considèrent que le monde du travail français en grève pour un oui ou pour un non est un tigre communiste toujours prêt à s’opposer et à bouffer les patrons. Les ordonnances ont limé les dents du tigre.

Deuxième temps : les capitalistes, français ou non, ont peur d’investir chez nous à cause d’une fiscalité dévorante à leurs yeux alors qu’ailleurs c’est mieux. Les facilités fiscales doivent les convaincre du contraire.

Donc, dans l’esprit du PR, ces deux conditions étant réalisées, la France deviendra compétitive dans le commerce mondial et attirera les capitaux pour créer des entreprises qui créeront des emplois, supprimeront le chômage et augmenteront les recettes de TVA que l’on pourra répartir entre les pauvres. La France deviendra un pays de cocagne que le monde entier enviera.

Sauf que l’économie théorique est une chose et la psychologie réelle en est une autre. Le PR est-il suffisamment naïf ou a-t-il oublié le milieu duquel il vient pour ne pas savoir que les riches ne sont jamais assez riches et demanderont toujours plus d’avantages pour investir en France et que les réformes qu’ils susciteront sous prétexte de concurrence ne seront jamais suffisantes. Ils ne seront satisfaits que lorsque les salariés se présenteront devant eux tout nus, sans protection, et qu’ils pourront les exploiter sans vergogne, comme cela se faisait au dix-neuvième siècle et comme cela se fait ailleurs aujourd’hui, en Europe de l’est et dans les pays sans protection sociale, tout en développant la robotique pour supprimer le travail humain. Il aura alors réalisé une économie vraiment moderne !

Quel est le sentiment qui guide la communication du PR : la naïveté, l’hypocrisie ou le cynisme ?

Que peut-on faire d’autre qu’attendre pour voir ?

Chronique N°29  du vendredi 28 décembre 2017. Excuses !!!

PéPé a mal aux yeux. Il ne peut plus travailler assez longtemps sur son ordinateur pour rédiger ses chroniques. En attendant d’aller mieux il les remplace momentanément, du moins il l’espère,  par les épisodes d’une nouvelle dont le titre est ‘Economies’ sous la forme d’un feuilleton. Elle lui a été inspirée par un Président de la République (PR) passé facile à reconnaître. Avec quelques modifications que le lecteur pourra se permettre elle peut encore s’accorder avec notre PR actuel. Elle est publiée sur Amazon.

PéPé vous présente ses excuses !!!

Economies

Episode 1

Conseil des ministres n°12

A Rapis, capitale de la Canfre, un conseil des ministres restreint et augmenté. Restreint parce que selon la volonté de notre Tout Puissant Président de la République Canfraise, Fred Monorgueil, quelques ministres seulement y assistent. Augmenté parce que, selon la volonté du même, des secrétaires et des sous-secrétaires d’état  ont été convoqués, ce qui est assez inhabituel. Donc sont présents ce jour-là dans la salle du conseil à l’Orthénon, nommés dans le désordre le plus total, messieurs et mesdames :

Fred Monorgueil, Tout Puissant Président de la République, et son Ombre,
René Tréfilou, Premier Ministre,
Léon Fricoseil, Ministre des Economies, des Finances et des Fins de Mois,
Jérémie Jamémieux, Ministre de l’Insécurité Sociale,
Noël Noëlotison, Sous-Secrétaire d’Etat aux Fêtes de Fin d’Année et du Quatorze Juillet,
Jaco Nexion, Secrétaire d’Etat aux Relations avec le Show-Biz et les Médias Complaisants,
Marguerite Latrique, Ministre de l’Amour, de la Santé, des MST et des Perversions Sexuelles,
Paul Ussion, Ministre de l’Intelligence Industrielle et du Libéralisme Economique,
Mimi Pinson, Ministre de la Culture, des Loisirs, du Jardinage et des Petits Oiseaux,
Olivier Piedemouton, Ministre de l’Agriculture, des Clones et de la Bio-Analogie,
Fernande Tardépoc, Secrétaire d’Etat au Temps Présent, à la Recherche et aux Technologies Rentables,
José Palefer, Secrétaire d’Etat aux Cultes, Sectes et Dévotions.

Le Tout Puissant Président ouvre la séance : « « Bonjour messieurs et Mesdames les Ministres, Secrétaires et Sous-Secrétaires d’Etat. Mesdames et messieurs, j’ai le plaisir d’ouvrir ce douzième conseil des ministres de l’année. Comme vous pouvez le constater, il est composé de façon inhabituelle. Je l’ai voulu ainsi et ce que Tout Puissant Président veut … . Nous sommes une fois de plus en pleine crise, l’inflation est galopante et notre déficit monstrueux. Lors de la grande crise précédente les gouvernements ont réussi à créer une économie sociale de marché moderne, c’est à dire à gommer tout ce que les socialo-anarcho-gaucho-communistes appelaient les acquis sociaux, sauf sur un point, la Sécurité Sociale. Elle est le vestige de l’archaïsme que nous combattons. Elle est dans notre pays comme une épine dans notre talon. Elle nous gêne et nous empêche de marcher vers le paradis libéral. Nous ne l’abattrons pas d’un seul coup, nous la démantèlerons petit à petit, mais assez rapidement tout de même car les circonstances sont favorables. Il suffit de la rendre plus impopulaire chez une forte minorité de nos électeurs. J’ai mon idée là-dessus. J’en ai assez dit. Je dois vous quitter. J’ai un rendez-vous de chasse en Pologne. Mon hélicoptère m’attend. Je vous laisse mais je passe la parole à notre cher Premier Ministre Tréfilou pour évoquer la première et plus importante question à l’ordre du jour. Je vous laisse entre ses mains.
– Merci Monsieur notre Tout Puissant Président. Voilà de quoi il s’agit. Les vieillards nous coûtent horriblement cher et plus ils sont vieux, plus ils aggravent le déficit. J’ai demandé une étude à l’INSBG (Institut National de Statistiques à la Botte du Gouvernement). Voilà ce qu’elle nous dit. J’ai arrangé un peu les chiffres pour qu’ils soient plus parlants. Ce sont eux que notre Tout Puissant Président veut voir publié dans nos médias, de façon tout à fait anxiogène pour les lecteurs, afin de préparer l’acceptation de ces mesures par une majorité démocratique. N’est-ce pas monsieur Jaco Nexion. Nous comptons sur votre entre-gent auprès des groupes de presse amis.
– Bien sûr Monsieur le Premier. Cela va de soi.
– Je continue. Je rappelle à ceux ou celles qui ne s’en seraient pas encore aperçu, parce qu’ils envoient leurs domestiques faire les courses, que la monnaie a changé. Nous avons abandonné l’euro pour l’écofric qui pesait très exactement 17 343,27 euros à sa création. Il a sensiblement le même pouvoir d’achat que l’euro au début de sa mise en oeuvre en 1999.

Comme vous pouvez le voir sur la courbe que vous trouvez à la première page du dossier qui est devant vous, le coût de la santé diminue avec l’âge linéairement de zéro à quinze ans, pour passer de 2000 à 1500 écofrics par an, suivant l’équation c = 2000-30a. Il augmente linéairement de quinze à cinquante ans pour passer de 1500 à 3000 écofrics par an suivant l’équation c = 40a-850. Ce qui nous interpelle, c’est la suite. Le coût passe de 3000 à 10 000 écofrics par an quand l’âge passe de cinquante à quatre-vingt-dix ans en suivant un accroissement exponentiel dont une équation approchée est c = 4a²-160a+1650.

Je ne vous parle pas de ceux qui passent au-delà de quatre-vingt-dix ans. Ils sont relativement peu nombreux, mais individuellement ils coûtent une fortune. Cerise sur le gâteux, oh ! excusez ce lapsus révélateur. Donc, cerise sur le gâteau, le coût des deux années de fin de vie lorsque celle-ci est due à une maladie de longue durée, (n’ayons pas peur des mots, le cancer) est de 200 000 écofrics, soit 100 000 écofrics par an quel que soit l’âge. Il en est de même pour les maladies dues à l’extrême vieillesse. Ce prix élevé est dû à l’utilisation des méthodes modernes d’observation, scanner, IRM, BREMEN, isofremirateur, gérontoscope, etc. d’analyses et de soin et au grand nombre de personnels plus ou moins spécialisé nécessaire à l’utilisation des machines et au suivi des patients.

Je rappelle que notre pays compte en gros 20 millions de jeunes de moins de 25 ans qui ne travaillent pas, 28 millions d’actifs et 20 millions de retraités. Cela fait approximativement 3 actifs pour 4 inactifs. Autrement dit un actif nourrit et cotise à la Sécurité Sociale pour 1,33 inactifs. Il faut absolument soulager les salariés et les entreprises des cotisations sociales qui plombent notre économie. Je ne pense pas qu’on puisse faire quelque chose du côté des jeunes. Il faut donc agir au niveau des vieux.

La moyenne pondérée des dépenses de santé pour un retraité compte tenu des soins de fin de vie est de 9 800 écofrics. Cette somme multipliée par 20 millions donne une dépense globale de 180 milliards d’écofrics. Vous comprenez d’où vient le déficit colossal de la Sécu. Comme dit notre Tout Puissant Président : « notre problème, c’est les vieux ». C’est là qu’il faut réformer pour que notre économie sociale avancée de marché soit tout à fait moderne. Vous avez toutes sortes de renseignements complémentaires dans le dossier que vous avez commencé de compulser.

Mes chers collègues, le problème est posé. Il nous faut le résoudre le plus brièvement possible sans perdre trop d’électeurs, car, attention, les vieux constituent une part importante de notre électorat. Vous allez donc réfléchir à la façon de nous sortir de cet embarras. Nous nous réunirons à nouveau dans un mois dans les mêmes conditions. Ce sera le conseil des ministres numéro seize. Je vous encourage vivement, bien que ce ne soit pas dans vos habitudes ou votre culture à vous concerter entre vous. Nous aimerions aussi que vous n’ébruitiez pas notre intention afin que nous ne me retrouvions pas avec l’église, l’opposition, toutes sortes d’associations de bien pensants, la Ligue des Droits de l’Homme et les révélations du Poulet Bâillonné sur le dos. Elles nous mettraient des bâtons dans les roues et compromettraient notre travail et l’efficacité de nos réformes. N’oubliez pas de procéder comme d’habitude, par petites touches, en traitant des minorités de façon à ne pas effaroucher la majorité silencieuse et éviter des manifestations d’opposition inutiles et qui coûtent cher.

Avez vous des questions à poser ? Monsieur Jamémieux ?
– Il y a plein de vieillards grabataires qui coûtent une fortune depuis des années. Peut-on envisager l’euthanasie ?
– J’attendais cette question. Oui et non. Oui dans son principe, non dans son énoncé. Il faut que nos mesures paraissent avantageuses, c’est à dire efficaces dans l’intérêt général, aux dépens d’une minorité qui n’intéresse pas grand-monde, sans soulever trop de problèmes éthiques ou moraux. En fait tout est une question de vocabulaire. Utilisez des mots qui n’attirent pas l’attention et n’exposent pas à la controverse. Nous y réfléchirons ensemble. Apportez les idées. Nous les ferons mettre en forme par des spécialistes.

J’attire votre attention sur cette idée de vieillards grabataires. Elle n’est pas mauvaise en soi, un peu évidente et beaucoup trop restrictive. Il faut trouver une mesure beaucoup plus large qui englobera le cas évoqué.

Une autre question ? Madame Mimi Pinson ?
– Je trouve cette idée révoltante, d’autant que nombre de personnes âgées utilisent une partie des prestations de la sécurité sociale pour nourrir et soigner les petits oiseaux, surtout les pigeons des villes. Nous avons besoin de nos grands parents. Ils constituent une richesse sentimentale. Ils gardent leurs petits enfants pendant que les parents travaillent. Ils représentent une certaine expérience et beaucoup de sérénité qu’ils transmettent à notre monde complètement fou.
– Tout cela est vrai. Mais ce sont de petits avantages par rapport au grand inconvénient qu’est la formidable trou de la Sécurité Sociale.
– Je ne suis pas d’accord !
– Madame la Ministre, nous avons déjà parlé de tout cela lors d’une précédente mesure de modernisation de notre société. Je vous conseille vivement de ne pas vous opposer à nouveau à notre projet de loi, de ne pas vous désolidariser du gouvernement, sinon vous démissionnez. Ou bien je retire les petits oiseaux de votre ministère et je les offre à Monsieur le député Aigledur qui n’attend que cela pour entrer au gouvernement, car comme vous, il aime les petits oiseaux, mais dans son assiette. Rappelez-vous, solidarité gouvernementale avec notre Tout Puissant Président à tout prix.
– C’est du chantage. Je vais m’en ouvrir à la presse. Et puis qu’est-ce que mon ministère a à voir avec cette réforme ?
– Vous ne voudriez pas contrarier notre Tout Puissant Président. Vous savez ce qu’il en a coûté à vos prédécesseurs qui l’ont défié ?
– Oui, je sais. C’est scandaleux.
– Non c’est la vie et le pouvoir du pouvoir. Pour répondre à votre question, j’ai déjà une petite idée du moyen que nous emploierons pour moderniser l’accès aux soins des vieux. Notre cher ministre de Finances, Monsieur Fricoseil m’en a touché deux mots il y a un certain temps déjà et la méthode semble, a priori, convenir à notre Tout Puissant Président. Si cela se confirme, nous aurons besoin de vos talents de ministre de la Culture.

Autre question ? Oui madame Latrique ?
– Si les carottes sont cuites, je ne vois pas bien à quoi sert ce conseil et notre présence ici, ni quel pourrait être le résultat de nos réflexions puisque c’est à chaque fois la même chose. Notre cher Tout Puissant Président nous met devant le fait accompli.
– Nous avons déjà évoqué cette question antérieurement. Je me répète. Vous savez très bien qu’il aime la discussion et la concertation pour donner l’impression que son point de vue est le meilleur. D’autre part, que dirait l’opinion s’il imposait tous ses projets de modernisation de la société sans les avoir auparavant confrontés à la sagacité des ministres de son gouvernement.

Et puis soyons francs, les lois que nous allons édicter risquent de choquer une partie de la population, et même de notre électorat, en particulier des milieux catholiques. Il ne faut pas qu’elles semblent émaner de sa seule volonté. Nous sommes ses fusibles. Toutes vos compétences réunies doivent permettre d’élaborer un projet sérieux, irréprochable dans son fond et dans sa forme de façon à être blindé contre les amendements proposés par l’opposition lors de son passage devant les assemblées.
– La plupart des gens n’est pas dupe. Nous nous couvrons de ridicule.
– La plupart de ceux qui ne sont pas dupes protesteront pour la forme, par hypocrisie ou par cynisme. Ils se conformeront apparemment à cette sottise qu’est la pensée unique appelée humanisme. En réalité ils se frotteront les mains car cette nouvelle réforme les arrangera.

Voilà, je pense que nous avons fait le tour de la question.

Messieurs Noëlotison, Nexion, Palefer, Madame Tardépoc, je vous remercie. Faites entrer les autres ministres qui patientent dans l’antichambre. Bonjour chers et chères collègues.

Nous allons traiter la suite de l’ordre du jour. Le nouveau point à discuter est le bonus à accorder aux candidats au baccalauréat d’une taille inférieure à la taille légale.


Chronique N°30  du vendredi 12 janvier 2018. Economies 2 ème épisode

Economies

Episode 2

Conseil des ministres n°16

C’est le même conseil des ministres restreint et augmenté que le conseil n° 12 avec :

Fred Monorgueil, Tout Puissant Président de la République, et son Ombre,

René Tréfilou, Premier Ministre,
Léon Fricoseil, Ministre des Economies, des Finances et des Fins de Mois,
Jérémie Jamémieux, Ministre de l’Insécurité Sociale,
Noël Noëlotison, Sous-Secrétaire d’Etat aux Fêtes de Fin d’Année et du Quatorze Juillet,
Jaco Nexion, Secrétaire d’Etat aux Relations avec le Show-Biz et les Médias Complaisants,
Marguerite Latrique, Ministre de l’Amour, de la Santé, des MST et des Perversions Sexuelles,
Paul Ussion, Ministre de l’Intelligence Industrielle et du Libéralisme Economique,
Mimi Pinson, Ministre de la Culture, des Loisirs, du Jardinage et des Petits Oiseaux,
Olivier Piedemouton, Ministre de l’Agriculture, des Clones et de la Bio-Analogie,
Fernande Tardépoc, Secrétaire d’Etat au Temps Présent, à la Recherche et aux Technologies Rentables,
José Palefer, Secrétaire d’Etat aux Cultes, Sectes et Dévotions.

Ouverture du conseil par le Tout Puissant Président puis discussion animée : « Bonjour messieurs et Mesdames les Ministres, Secrétaires et Sous-Secrétaires d’Etat. Mesdames et messieurs, j’ai le plaisir d’ouvrir ce seizième conseil des ministres de l’année. Première question à l’ordre du jour : comment économiser sur les vieux. Je sais que vous vous êtes concertés relativement au problème défini lors du conseil numéro douze. Quelles sont les solutions que vous avez envisagées ? Monsieur le Premier, vous avez la parole.
– Sauf  monsieur Jamémieux qui a sa propre solution à proposer, tout le monde s’est rallié à la proposition de Monsieur Fricoseil. Ecoutons Monsieur Jamémieux quand même. Monsieur Jamaismieux vous avez la parole.
– Je préconise une solution simple et facile à mettre en œuvre qui va éviter de dépenser au moins cent-vingt milliards. Attribuer à chaque personne qui a dépassé l’âge de la retraite une somme forfaitaire annuelle, qui reste à évaluer, entre vingt-cinq et trente eurofrics,  pour ses soins de santé. Elle définira à sa convenance ses priorités. Par exemple elle choisira un antalgique plutôt qu’une prothèse. De toute façon elle pourra compléter ses soins, si elle en a les moyens, en dépensant ses revenus personnels au lieu de thésauriser, ce qui alimentera les caisses de l’Etat à travers la TVA. J’avais pensé obliger sa famille à lui venir en aide. Mais ce ne serait ni équitable, ni républicain, car il y a beaucoup de vieux qui n’ont pas de famille, qui ont une famille insolvable ou qui n’a pas envie de faire soigner ses vieux ».

Notre orateur s’énerve soudain. « Moi par exemple, je n’ai pas envie de payer pour maintenir en vie mes vieux parents. Ils sont acariâtres et communistes. Je ne les supporte plus. Je voudrais les savoir sous une grosse dalle de granit pour qu’ils ne me fassent plus ch … ces sales c … .
– Il serait bon de ne pas créer des lois pour résoudre ses problèmes personnels, ou alors il ne faut pas le dire. Il faut penser à la Canfre.
– Vous avez raison. Je me suis laissé emporter par ma tempérament sanguin. Je vous prie de m’excuser.
– Que ferez-vous des vieux qui n’auront pas d’argent pour se soigner ?
– Rien, j’attendrai qu’ils meurent.
– Et on nous accusera d’iniquité, car seuls les pauvres mourront.
– Ce sera tant mieux. La Canfre n’a pas besoin des vieux pauvres. En même temps que ça soulagera la sécu, ça allégera les charges des caisses de retraite. Ça permettra aux riches de consommer davantage de produits à forte TVA alors que les pauvres n’achètent que de la bouffe à cinq virgule cinq pour cent, d’où une baisse du déficit de l’Etat. Je vous rappelle quand-même que tout le monde meurt. Les pauvres plus vite que les riches, soit ! Personne ne s’en plaint. Simplement je ne préconise qu’une accélération du mouvement. Les ONG et les associations charitables seront autorisées à leur procurer des analgésiques puissants, tellement puissants qu’ils les endormiront pour l’éternité.
– C’est de l’euthanasie.
– Pas du tout. C’est de la charité publique. C’est soigner son prochain définitivement. On plonge bien certains malades dans un coma artificiel, qui est finalement une sorte de mort, car souvent la médecine n’arrive pas à les réveiller.
– Qu’en pense notre Tout Puissant Président ?
– Je pense que cette solution est limpide, nette et sans bavure. Elle n’a qu’un inconvénient, celui de la brutalité. En effet si j’annonce qu’à partir du prochain premier janvier tous les citoyens de plus de, mettons soixante ans, ne toucheront que vingt-sept écofrics par an de la sécurité sociale pour se soigner, je vous laisse imaginer ce qui va se passer dans le pays car la mesure va concerner le tiers de notre population. Les salariés qui arrivent à cet âge vont se sentir concernés. On va nous taxer de fascisme, ce qui n’est pas déshonorant en soi, mais c’est mettre le feu aux poudres. Ce n’est pas le moment. Par ailleurs, pratiquement, aucun pauvre, quelles que soient sa valeur intellectuelle ou ses qualités, ne peut y échapper. Malgré son aspect équitable cette mesure n’est pas républicaine, elle est injuste, cruelle et sans espoir. Il faut penser politique, et cette mesure ne l’est pas. J’attends donc une autre suggestion. Qu’en pensez-vous Monsieur le Premier ?
– Je ne peux pas faire autrement que d’être entièrement d’accord avec vous, Monsieur notre Tout Puissant Président.
– A la bonne heure. Je n’en attendais pas moins de vous. Demandez donc à notre Ministre de l’Economie, des Finances et des Fins de Mois ce qu’il en pense.
– Qu’en pensez-vous Monsieur le Ministre de l’Economie, des Finances et des Fins de Mois ?
– Je ne peux pas en penser autre chose que ce qu’en pense notre Tout Puissant Président.
– Vous nous avez confié que vous avez une solution de remplacement. Exposez-là.
– Tout à fait. Elle est progressive, intelligente, rationnelle et accélérée.
– Nous n’en doutons pas mon cher.
– Merci notre Tout Puissant Président.
– Exposez-la nous donc.
– Oui monsieur notre Tout Puissant Président. Mais j’en ai déjà touché deux mots à mes confrères, comme vous nous l’aviez demandé par la bouche de Monsieur le Premier.
– Bien. Recommencez devant tout le monde pour qu’il n’y ai ni malentendu, ni jérémiade, ni récrimination.
– J’expose donc ma méthode. Mon idée est que la mesure doit être progressive, intelligente, rationnelle et accélérée comme je l’ai déjà dit, mais aussi qu’elle ne soit pas brutalement systématique sous prétexte d’être républicaine ou démocratique comme celle préconisée par mon meilleur ennemi (autre lapsus révélateur), excusez-moi– je voulais dire mon meilleur ami monsieur Jamémieux.
– Quand vous aurez fini de tourner autour du pot pour vous faire valoir nous pourrons peut-être entrer dans le vif du sujet.
– Ne vous impatientez pas, les arguments que j’avance ne sont pas pour vous convaincre car je sais que vous m’êtes acquis, mais pour qu’ils figurent dans notre presse. La base de mon programme est un partage de la population de vieux en deux sous-populations : ceux qui aiment la vie et les autres. Pourquoi garder vivants ceux qui n’aiment pas la vie et même parfois la détestent. Pour tout vous dire, mais il ne faudra pas le répéter, ils ne méritent pas de vivre et de creuser le trou de la sécu.
– Je suis tout à fait d’accord avec notre ministre Fricoseil. Qu’en pensez-vous mon cher premier ?
– Si vous êtes d’accord cher Tout Puissant Président, le Conseil dans son ensemble l’est aussi.
– Ne soyez pas familier avec moi devant tout le monde, mon cher Premier. Continuez Fricoseil.
– Comment reconnaître les premiers ? J’ai posé la question à notre psychologue officiel que vous connaissez tous, puisqu’il a de nombreuses émissions à la télévision, j’ai nommé le docteur Hans Télépatmann. C’est très simple m’a-t-il dit. Les vieux qui aiment la vie vivent avec leur temps. Rien de ce qui est humain ne leur est étranger, histoire géographie, sciences, informatique, transbalabalatalique, mais aussi théâtre, littérature, cinéma, opéra, chansonnette, variété, pornographie, viagra, politique, plein de choses en ique, travail, famille, patrie, liberté, égalité, fraternité, Dieu et mon droit, etc. Il suffit de les distinguer de la masse des ignares stupides qui se complaisent dans leur bestialité, leur crasse intellectuelle, leur vide spirituel sidéral et qui vivent mécaniquement en attendant, avec plus ou moins d’impatience et sans initiative, leur départ pour un monde qu’ils croient meilleur et qu’on va leur offrir sur un plateau aussi rapidement que possible.
– Excusez-moi, monsieur le ministre, mais madame Mimi Pinson voudrait intervenir ?
– Merci Monsieur le Premier. Je sais que la solidarité gouvernementale est la règle. On me l’a dit plusieurs fois. Je veux quand même donner mon opinion sur ce qui vient d’être dit. Je trouve cela révoltant. Voilà des gens, ces pauvres incultes que vous assassinez avec insouciance, qui ont trimé toute leur vie avec le faible espoir d’une retraite bien méritée pour laquelle ils ont cotisé durement dans l’espoir de profiter du temps enfin libre, de leurs époux, de leurs enfants et petits enfants et vous voulez leur arracher ces moments de bonheur qu’ils ont gagné à la sueur de leur front.
– Ma chère Mimi Pinson, on ne travaille pas pour sa retraite, mais pour gagner de l’argent pour vivre et faire vivre sa famille et apporter sa pierre si modeste soi-elle à la construction de l’œuvre sociale. Cotiser pour vivre en parasite quand on n’est plus bon à rien est immonde et immoral.
– Monsieur Fricoseil, je vous savais cynique, mais j’ignorais que vous aviez un cœur de pierre.
– Madame Mimi Pinson, vous êtes une oie blanche. Quand on gouverne, pour le bien de la Canfre, on doit accrocher ses sentiments au vestiaire de l’anti-chambre du Conseil des Ministres.
– La Canfre est peuplée de Canfrais. Et les Canfrais ce sont des gens. Pour les rendre moins malheureux, il faudrait que vous partagiez. Tout ce que vous préconisez, c’est de les rendre plus malheureux pour que vous et les vôtres amassiez inutilement toujours plus en payant moins d’impôts.
– Parfaitement. Vous avez tout compris. C’est pour ça que je fais de la politique. Et si ça vous déplaît sortez d’ici, allez retrouver vos minables et inscrivez-vous au parti communiste … .
– Goujat.
– Ça suffit, Madame Mimi Pinson, vous nous faites le même coup à chaque projet de loi. Vous bloquez inutilement les séances. Vous parlez pour ne rien dire. Je vais être obligé de vous demander de présenter votre démission.
– Je vous la présente bien volontiers Monsieur notre Tout Puissant Président. J’en ai marre de toutes ces simagrées hypocrites. Je m’en vais.
– Non, restez, j’ai encore besoin de vous.
– Bon, mais c’est bien la dernière fois.
– Merci, et cessez de troubler le conseil des ministres. Il faut qu’on avance.
– Oui Monsieur le Tout Puissant Président.
– Continuez Monsieur Fricoseil. Expliquez-nous comment, pratiquement, vous allez séparer le bon grain de l’ivaie.
– Merci Monsieur le Tout Puissant Président. Voilà le point crucial de mon idée. On va faire passer à tous les retraités un examen …
– Madame Tardépoc veut intervenir.
– Vous n’y pensez pas. On a déjà un mal fou à organiser le bac pour une classe d’âge. Comment allons-nous nous y prendre pour faire passer un examen à vingt millions d’individus dont certains sont grabataires ? C’est fou !
– Qu’avez-vous à répondre à ça, Monsieur le Ministre des Economies, des Finances et des fins de mois ?
– L’examen du bac utilise une méthode antédiluvienne, archaïque, vieillotte. Nous sommes au vingt et unième siècle, que diable. Utilisons les méthodes offertes par l’informatique, les statistiques et les nouvelles technologies. Evidemment pour mettre en œuvre ce système, cela demandera, un peu de temps, d’argent pour la préparation et en revanche très peu de personnel pour l’exploitation.
– Je propose d’abandonner là la discussion de cette réforme pour l’instant et de nous réunir à nouveau pour discuter de tout ça au conseil numéro vingt. Monsieur Fricoseil, établissez un protocole opératoire et commencez à chiffrer le coût de votre proposition. Il ne faudrait pas que ça coûte plus cher que ça ne rapporte. Passons à la suite de notre ordre du jour, qui est, Monsieur le Premier ?
– Oui Monsieur notre Tout Puissant Président. Messieurs Noëlotison, Nexion, Palefer, Madame Tardépoc, je vous remercie. Faites entrer les autres ministres qui patientent dans l’antichambre. Bonjour chers et chères collègues.

Seconde question à l’ordre du jour sur proposition de la SPA : l’interdiction de mettre des poissons trop grands dans des aquariums trop petits.

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